«
Cry Baby », « Edward aux Mains d’
Argent » (1990), « Arizona
Dream » (1993), «
Dead Man » (1995), « Las Vegas Parano » (1998), «
Sleepy Hollow » (1999), « Charlie et la Chocolaterie » (2005) ou encore les quatre volets de la saga à billets verts « Pirates des Caraïbes ». A l’énoncé de ces long-métrages à succès des années 90/2000, vous répondrez sans peine et à tue-tête comme des groupies adolescentes du premier jour : « Johnny Depp ! ». Acteur bankable favori des producteurs cinématographiques véreux d’Hollywood la vicieuse, des tapisseries roses des chambres de pucelles appareildentarisées ou des couvertures salaces des torchons people occidentaux, quel peut bien être le rapport entre Johnny Depp et un obscure combo de hard rock américain de la bonne époque répondant au patronyme de
Rock City Angels ?
Rock City Angels voit le jour en Floride sous le nom de The Abusers en 1981 autour du chanteur Bobby Durango et du bassiste Andy Panik. Sujet à de nombreux changements de personnel et officiant dans un registre punk qui le consacre rapidement petite gloire scénique locale, The Abusers devient un groupe de rock dur en optant pour le nom de guerre de
Rock City Angels. Stabilisés autour d’un line up comprenant la paire de guitariste Jimmy James/
Jack Smack et le batteur Punky Stevens, les floridiens décident de tenter leur chance à
Los Angeles en rejoignant la Californie en juin 1986 avec un contrat New
Renaissance Records sous le bras. Loin de son Sunshine State natal, souffrant de la forte concurrence du Sunset Strip et après quelques mésententes internes,
Rock City Angels se retrouve en duo après le départ du percussionniste Punky Stevens pour
Johnny Crash et le renvoi des guitaristes James et
Smack. Seuls maitres à bord comme aux débuts de The Abusers, Bobby Durango et Andy Panik recrutent donc le batteur Jackie D. Jukes ainsi que le six-cordiste Mike Barnes qui ramène avec lui son ami guitariste Johnny Depp pour grossir les rangs de
Rock City Angels. Egalement acteur de télévision et de cinéma cantonné à des personnifications mineures, Depp choisit de quitter
Rock City Angels après un an de service quand il se voit offrir le premier rôle de la série TV « 21 Jump Street » (1987-1991) qui le révèlera au grand public. L’ayant remplacé par le dénommé Doug Banx,
Rock City Angels continue sa route et voit Geffen Records racheter le deal New
Renaissance Record. Enregistré aux légendaires Ardent Studios de Memphis sous la houlette de Joe Hardy, « Young Man’s Blues » sort en 1988.
A jamais lié dans l’esprit des amateurs de l’âge d’or du hard rock sleaze au passage dans ses rangs de la movie star Johnny Depp même si ce dernier n’a pas enregistré de support officiel avec le groupe,
Rock City Angels n’en demeure pas moins d’un point de vue strictement objectif un combo on ne peut plus digne d’intérêt pour qui aime le soir venu se passer un petit vinyle d’époque tout en caressant la bouteille de bourbon. Ouvrant « Young Man’s Blues » avec style et attitude, « Deep
Inside my
Heart » offre à l’auditeur un sublime titre hard rock teinté de blues sentant le Sud à plein nez et à la rythmique particulièrement prononcée, empreint qui plus est de subtiles notes de cuivres dans la plus pure tradition sleaze (
Hanoi Rocks, L.A. Guns..). Dans une veine comparable de rock dur dit de tradition nullement affecté par les vices de l’époque (claviers pépondérants, productions lisses..etc), impossible de ne pas prendre son pied sur le fluide et groovy «
Hard to Hold » mis en valeur tant par le timbre vocal rocailleux de Bobby Durango que par un solo certes basique mais diablement efficace du lead guitarist Mike Barnes ou encore sur l’enthousiaste et même particulièrement jovial « Our Little Secret » traitant de la complicité amoureuse cachée d’un couple illégitime. Davantage proches d’une streetlife marginale puant la drogue et le sexe des bas fonds du Sunset Strip que d’une existence bien rangée avec le chien-chien, les petites têtes blondes, la tondeuse à gazon et accessoirement la femme dans une belle villa de Beverly Hills aka une putain de vie de merde, les authentiques
Rock City Angels aiment à pratiquer le rock n’ roll des anciens sans néanmoins faire économie de la puissance sonore propre à la seconde moitié des années 80. Preuves en sont la courte mais terriblement roots « Damned Don’t
Cry », le délicieusement groovy et mid tempo « Boy from
Hell’s Kitchen » voyant Durango narrer avec entrain son lifestyle et ses ambitions ou encore l’enthousiaste et harmonieuse «
Hush Child » ; énième symbole de la furie et de la spontanéité d’un groupe sachant allier avec brio classe rock n’ roll et énergie brute.
Combo musicalement inspiré accusant de nombreuses années de galères et d’errance dans l’underground punk et hard rock,
Rock City Angels parait posséder le recul nécessaire pour offrir à l’auditeur un premier full length incisif et ouvertement marqué par un souci de variété permettant d’équilibrer et d’enrichir la démarche « Young Man’s Blues ». Ainsi, relevons les pièces remarquablement originales «
Beyond Babylon » qui exotique car présentant de succulentes sonorités funk donnera résolument envie à ces dames de remuer les hanches et à ces messieurs de défoncer le parquet à coups de cowboy boots ou encore la légère et mélancolique « You Gotta Swear » qui fermant l’album avec esthétisme et délicatesse, rappellera inexplicablement la teneur nonchalante de certains hymnes générationnels des mythique Beatles ; un style relativement mélancolique et léger au sein duquel évolue également un groupe comme le génial et non moins légendaire The Jesus and Mary
Chain des frères Reid. Bien évidemment et comment aurait-il pu en être autrement compte tenu du contexte spatio-temporel inhérent à ce premier disque de
Rock City Angels, les indispensables et obligatoires ballades ne sont pas en reste sur ce « Young Man’s Blues » de 1988 flirtant dangereusement avec le sans-faute. Notons ainsi la classieuse et intensément grave « Mary » coécrite par M. Johnny Depp en personne s’il vous plait, mais surtout la magnifique «
Liza Jo » objet d’un très bel alliage synergique de guitare acoustique et de piano dédiée à la jeune femme du même nom qui après une brève aventure est toujours éprise du bad boy motherfucker Bobby Durango alors que ce dernier n’en a plus grand-chose à foutre dans tous les sens du terme (« Well, you overlooked my ways and kept on lovin’ me […] But you don’t need me
Liza Jo, you still want me
Liza Joe.. »). Frissons garantis même pour les âmes les plus sombres d’entre nous tant l’émotion s’avère être paradoxalement palpable dans les vocaux de Durango malgré son désintérêt affichée pour cette énième groupie saucée et jetée comme un mouchoir.
Premier album d’un groupe davantage connu pour son histoire commune avec Johnny Depp que pour ses qualités strictement musicales et conceptuelles, « Young Man’s Blues » de
Rock City Angels constitue un opus on ne peut plus inspiré et réussi pouvant provoquer une haute addictivité chez l'auditeur. Mené par la voix rocailleuse de Durango et par les riffings/soli terriblement efficaces et pleins de feeling de la paire Mike Barnes/Doug Banx, « Young Man’s Blues » officie avec brio dans un hard rock roots empreint d’un core bluesy/sudiste jouissif. Varié et fluide à l’écoute, raffiné mais brut également ; « Young Man’s Blues » transpire indéniablement d’authenticité et saura donner une véritable leçon de rock n’ roll à quiconque ayant besoin de cours de soutien. Passé relativement inaperçu à sa sortie et n’étant même pas apparu dans le Billboard 200 alors que Geffen espérait qu’il surfe commercialement sur la vague « Appetite for
Destruction », l’excellent « Young Man’s Blues » fut rendu disponible en
Europe via une version double-LP agrémentée de cinq bonus tracks par rapport à la version américaine bien plus indispensable. A vos portefeuilles bande de old school hard rockin’ motherfuckers !
Bien cool de se relire cette chronique après avoir enfin réussi à choper ce disque en LP et CD ! Un régal cet album, comme tous ceux découverts via les chroniques d'Adrien ! Tu t'y remets quand ??? ;-)
Merci pour ton comm Zaz ! J'ai quelques articles entamés qui prendront bonne et due forme tôt ou tard, mais je dois avouer que la nouvelle forme du site, adaptée pour les téléphones et tablettes, me décourage un peu dans mon investissement.. idem pour les photos.
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