Je commençais à en entendre souvent parler. Un nom éphémère suspendu dans une conversation, mais qui ne manquait pas d'éveiller en moi une certaine curiosité. Fouillant et farfouillant dans les méandres de la toile je m'empressai de me renseigner sur ce groupe qui semblait gagner en notoriété. Qu'elle fut ma stupeur lorsque la fatalité me mis nez à nez avec la très maigre discographie du groupe ... Et pour cause, avec seulement une EP, "Straight from the horse's mouse", sortie fin octobre
2012, le groupe s'est déjà taillé une bonne réputation sur la scène française et ce malgré son jeune âge.
Je ne savais si il fallait me montrer sceptique ou enthousiaste devant cet artwork qui déjà était très travaillé, mais on ne juge pas les choses à leurs apparences me diriez vous, et bien cette fois je pense que je vais vous donner tord. La musique de
Zapruder est à l'égal de son artwork : travaillée, ambiguë, puissante ... N'attendons donc pas plus longtemps pour nous plonger dans l'autopsie de cet Ep.
Un homme : Un aspect sec, brut nous réveille en sursaut dès la première note de cet EP. "Guns, Speech & Madness" est immédiatement mis en première ligne pour nous faire ressentir l'antithèse du réconfort. Après quelques notes discordantes de guitare, la voix d'Isaac, véritable exutoire, nous fait clairement comprendre que "tout ne vas PAS bien se passer"... Simples, clairs et efficaces les riffs se suivent portant en eux ce qui semblerait être toute la colère du fond humain.
Pas de fioriture en effet, on ne tombe pas dans la démesure et le graveleux, ni même dans le gracieux : les instruments n'ont rien de danseuses étoiles, il n'y a pas d'effets superflus. C'est comme les poils de cul bien en évidence, la musique ne cherche pas à à faire dans le sobre. On se joue d'ailleurs de l'apparence du moment que ça sonne vrai et que ça claque, et c'est ça qui fait l'attrait de chacune des musiques de "Straight from the Horse's Mouth"
Une ombre: Une simple ombre sur un mur... Et le ton est donné! Le noir domine l'illustration, une tâche toujours plus sinistre s'étend tel un monstre émanent directement de notre condition d'être humain. C'est comme un cauchemar musical s'offrant à nos oreilles qui, derrière l'aspect très brut de décoffrage de certaines musiques, se fait sentir peu à peu comme c'est le cas avec "Falling Like
Dead Snakes". Tandis que monte les larcènes, la basse laisse entendre une voix caverneuse transformant l'atmosphère générale en dégradé de noir et blanc. On évolue dans des effluves musicales rustiques, froides et mesurées, et pourtant! Entrecoupé de riffs sautés,"We Carry Just Enough to play", est un des exemples de musique prenant plaisir à couché sur une table ce qu'il semblerait être l'autopsie du mal. Le nom même! "
Zapruder" tire ses origines d'une histoire tragique (celle d'
Abraham Zapruder), le destin d'un homme mêlé, malgré lui, à la folie humaine dans toute sa splendeur. C'est aussi ça
Zapruder, une ambiance lourde et pesante musicalement, un regard intérieur sur les sinistres chimères de l'Homme, le tout plongé dans l'ombre.
Un tunnel : On s'enfonce dans ces méandres auditifs, dans ces pulsions musicales brutes et sombre à la fois... Quand soudain ! Une guitare lâchant quelques notes en équilibre sur le fil du son. La reverbe rend la chose plutôt mélodieuse et l'on se prend au jeu lancinant de celle-ci. La batterie est cependant là pour nous rappeler que nous sommes toujours dans
Zapruder. Marquant chaque temps d'un puissant coup de tome, brutal et rythmé qui nous empêche de quitter terre. Le temps passe, l'harmonie ne perd rien de son charme, renforcé peu à peu par l'arriver de la disto simple mais efficace. Et même si aux premiers abords, la voix d'Isaac est emprunte d'une puissance et d'une rage sans précédent, on se retrouve soudainement avec une voix claire, un peu grungie, une lueur de sérénité prenant son envol au beau milieu de cet EP absolument entêtant.
Zapruder et son dégradé de noir sur blanc fait une fois encore mouche.
Et une tête de cheval : Il y a quelque chose. Quelque chose dans chacune des musiques de "Straight from the Horse's Mouth" d'incongru, de surprenant. Une envolé de saxo sur un break jazzy pendant une musique ultra lourde ? Et alors ... Vous avez joué gros les gars mais c'est tout à votre honneur. Quand le métal se perd dans les méandres des instruments vus et revus, vous avez su faire la différence. Une pointe de growl sur "Guns, Speech & Madness" ? He bien pourquoi pas ! Pourquoi toujours chercher à catégoriser un genre musicale quand finalement tout le monde ne recherche qu'une chose : l'innovation. Les gars de
Zapruder ont bien compris la leçon en tout cas et ce n'est d'ailleurs pas pour rien qu'ils se nomment eux même du "Post-Truc"...
On les attend au tournant pour un prochain album, sur la cours des grands. Mais nul doute qu'avec "Straight from the Horse's Mouth ", le groupe
Zapruder nous en a fait voir de toutes les couleurs. Du blanc comme du noir.
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