Liste des groupes Metal Gothique Menzia Lamb's Skin for the Wolf

A une époque où les cadors du metal symphonique gothique et lyrique à chant féminin s'imposent aux quatre coins de la planète, à l'image de Nightwish, Within Temptation, Leaves' Eyes, Epica ou Amberian Dawn, d'aucuns diront que les nouveaux prétendants n'ont qu'à bien se tenir. Et pourtant, dans cet attractif et néanmoins périlleux registre, les jeunes recrues n'ont jamais été aussi nombreuses à se bousculer pour espérer faire entendre leur voix. C'est dans cette bouillonnante atmosphère qu'émerge de sa terre ibérique natale ce pimpant quintet barcelonais, prêt à en découdre et avec ses propres armes. Depuis ses débuts, en 2009, la troupe évolue dans un rock'n'metal gothique et mélodique frais et enjoué, aux relents symphoniques, dans le sillage de Delain, The Fall Of Eve, L'Ame Immortelle et consorts. Tout un programme...

Créé en 2009, le combo espagnol n'a pas attendu bien longtemps pour nous livrer sa toute première démo « Lamb's Skin for the Wolf » ; auto-production de 8 titres sortie cette même année et concoctée par d'ex membres de Lost In Madness, à savoir : Gat (ex-Seven Nights, ex-Ungravity...) au chant, dont le grain de voix et les modulations rappelleront point pour point ceux de Laura Tracey (The Fall Of Eve) ; Didac Narvaez à la guitare ; Berni Navarro (ex-Universe Of Dreams, ex-Qamar...) à la basse ; Roger Gomez (ex-Ungravity) à la batterie et Montse Ballbé (ex-Soul Hunters) aux claviers. Si le mixage semble bien ajusté entre lignes de chant et instrumentation, l'enregistrement, en revanche, laisse filtrer quelques notes résiduelles et les finitions manquent encore à l'appel. Ces quelques erreurs de jeunesse sauraient-elles se faire oublier au point de nous intimer d'aller jusqu'au bout des 35 minutes de l'offrande ?

Le collectif espagnol n'a pas tari d'inspiration, nous livrant avec sa candeur toute naturelle et un certain panache quelques titres susceptibles de figurer dans les charts. A commencer par le tempétueux et galvanisant « Waiting for your Reason », où les inflexions aigres-douces, un tantinet nasillardes, de la sirène font mouche, notamment sur un entêtant refrain. Saisissant instant que n'aurait pas renié Delain. Pour sa part, le progressif et trépidant « Inside of Me » évolue sur un troublant duo féminin en voix claires. Dans la mouvance de The Fall Of Eve, avec une touche hispanisante en substance, cette souriante proposition se dote d'une ligne mélodique accrocheuse, mais nullement galvaudée, mise en relief sur un refrain immersif à souhait. De redoutables armes de séduction, s'il en est. Ce ne sont pas les arpèges de clôture au piano qui démentiront ce constat.

Parfois, nos acolytes se plaisent à accélérer encore la cadence, parvenant alors à nous retenir plus que de raison. A titre d'illustration, on ne passera pas outre les mordants « Stupid Loop » et « Puppet », aux airs de L'Ame Immortelle, qui ne nous lâchent pas d'une semelle. Des gimmicks oscillants, une section rythmique aussi vrombissante que resserrée et des arrangements nightwishiens s'inscrivent dans ces deux pistes éminemment avenantes, dont les refrains efficaces ne sont par les moindres de leurs mérites. Difficile également d'échapper aux riffs corrosifs et à cette rythmique qui déchire tout sur son passage à l'aune du rageur « Time of Truth ». On aurait peut-être espéré une mélodicité moins linéaire et éluder de sempiternels gimmicks aux claviers typés années 80, qui ne s'imposaient pas.

A la lumière de ses moments intimistes, le groupe aurait encore une corde à son arc, parvenant sans mal, et en toute simplicité, à toucher notre fibre émotionnelle. Ce qu'il nous démontre sur la power ballade « My Own Drug ». Un touchant duo féminin évolue avec grâce sur une piste où de sereines montées en puissance s'insèrent dans une trame éminemment fondante. Un vibrant instant aux séries d'accords finement sculptées, susceptible de laisser quelques traces dans la mémoire de ceux qui y auront investi leur âme.

Dans l'ombre des pistes sus-mentionnées, développant pourtant une énergie non moins communicative, d'autres passages ne sauraient s'imposer. Dans la veine mélodique de The Fall Of Eve, le fringant « Sick Circus » en est une illustration. Si, au regard de ses riffs plombants adossés à une rythmique résolument offensive, un headbang peut s'esquisser, on déplorera toutefois des sonorités synthétiques surannées et kitchissimes, ainsi qu'un solo de guitare à l'incertain positionnement. On passera aussi sur « Game Over » qui, en dépit de belles accélérations rythmiques, dénote un jeu d'harmoniques manquant de cohérence et bien peu de relief mélodique.

Pour un premier essai, de par leur allant, quelques prises de risques et leur fine technicité instrumentale, nos cinq compères s'en sortent assez honorablement, abstraction faite d'une production d'ensemble encore taillée dans la roche. Ainsi, on découvre un album bien inspiré, plutôt accessible de par ses compositions enjouées et ses mélodies efficaces, mais qui parfois nous égare dans des chemins de traverse. Diversifié dans ses échanges oratoires et ses phases rythmiques, cet opus aurait gagné à varier ses atmosphères, ses exercices de style, et à renoncer à recourir à des nappes synthétiques d'un autre âge. Bref, une première et prégnante offensive, pas encore un foudre de guerre. On l'aura compris, en dépit d'un réel potentiel, le combo ibérique devra prendre le temps d'affûter ses armes pour se poser en véritable challenger. Mais on n'est encore qu'au début d'un voyage que l'on espère au long cours...