KFR >> Interview - Maxime Taccardi
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Jeudi 30 Janvier 2014 - 09:00:32
A l'occasion de la sortie courant février du premier album "Anti" de son projet solo K.F.R., Maxime Taccardi, plus connu dans l'univers du Metal sombre pour ses artworks hors-norme, m'a accordé cette interview.

1) Bonjour Maxime. Peux-tu te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas ?

Mon but est de répandre mes Visions artistiques par n'importe quel medium: peinture, vidéo ou bien encore la musique dont il est question ici. J'ai fait pas mal d'artworks pour différents projets musicaux comme Drowning The Light, Atra, Monarque, Necrophagia, Hell Militia, Dodkvlt, Happy Days, Hats Barn etc. L'idée de mettre en avant un projet qui mêle à la fois la musique et la peinture remonte à quelques années déjà. Une sorte de Gesamtkunstwerk sombre, un art total et décadent.

2) Que signifie KFR ?

K.F.R signifie “kafir”, un mot arabe qui désigne celui qui ne crois pas, le mécréant. Ce mot est inscrit sur le front de Dajjal, l'antéchrist dans la religion musulmane.

3) Quel est le concept lié au titre ANTI ? Et quelles sont les thématiques traitées au sein de l'album ?

Anti, qui est la première partie d'une trilogie, est basé sur la négation de toutes choses, la mort y plane telle un Spectre indicible. Il y est aussi question de Dajjal et de son avènement sur terre. Le titre “Larv”, quand à lui, traite du Suicide : en effet, un ami a tiré sa révérence peu avant que j'enregistre ce titre, j'ai donc écrit des paroles en tant qu'hommage.

4) De quelle façon procèdes-tu pour la composition de tes titres ? Improvisation, processus de création long, ou même les deux ? Je me souviens avoir lu que tu utilisais tes rêves et cauchemars pour composer.

La composition des titres varie.

J'avais quelques riffs en tête depuis des années, que j'ai réenregistré pour ce disque. C'est notamment le cas pour “Terror” et “Heal me”. Je me dois d'être dans un état d'esprit proche de la transe afin de mettre en son mes peintures.


Certaines parties ont été totalement improvisées et assemblées parfois, comme les fold-in de William S. Burroughs en littérature (technique aléatoire dite du du “cut-up” où un texte se trouve découpé au hasard puis réarrangé pour produire un texte nouveau).

Mon but étant d'accentuer l'onirisme du projet. Rien n'y est lumineux, ni même mélodique, il s'agit d'un magma sonore intense et branlant, un rituel hideux et opaque dans lequel chaque note résonne comme une offrande à la mort. Un titre comme “My Torments” est particulier par exemple car j'en ai rêvé des années auparavant, je me souviens de ce rêve comme si je l'avais réellement vécu. Ces notes d'orgue résonnaient alors en moi comme une vision, comme le message d'une chose à venir. Ce titre revêt donc une aura particulière, de même pour les vocaux que j'ai enregistrés la nuit dans la plus grande solitude.

5) Dans KFR, en dehors des vocaux, assures-tu tous les instruments ?

Je me charge de tous les instruments sauf des drums qui sont exécutés par Déhà (multi-instrumentiste qui officie entre autre dans Aurora Borealis, Deviant Messiah, Yhdarl, etc ...). Il a parfaitement compris dans quel sens se dirige le projet, à savoir une structure musicale alambiquée hors du schéma traditionnel de composition classique. Par là j'entends que certaines rythmiques s’enchaînent sans que l'on s'y attende. Bien sur cela va en rebuter un bon nombre, mais de toute évidence il s'agit d'un disque malade que j'ai composé avant tout pour moi seul. Si certains y adhèrent tant mieux, quand à ceux qui le dénigre, qu'ils crèvent. Il représente pour moi l'exacte transposition sonore de mes peintures. En conséquence, celui-ci se devait d'être sale, caduque et mortuaire.

6) Pourquoi la mort est-elle un sujet aussi récurrent et important dans ton univers, que ce soit musical ou artistique ?

La mort fait partie de moi car je l'ai vu emporter beaucoup d'être chers, le fait d'en faire mon principal sujet de création me permet de l’appréhender voir de la courtiser en quelque sorte. Nous y sommes tous destinés, peu importe notre condition, rien n'y échappe. Cette idée d'éradication totale de toute chose est fascinante et représente selon moi la quintessence de nos tourments.

7) Je me souviens que tu m'avais confié être dans un état de transe durant le processus de composition / session enregistrement, à la manière d'un rituel, ce sans aucun ingrédient extérieur, ni alcool ni drogue : comment fais-tu ?

Je ne consomme ni alcool, ni drogue, en conséquence je rentre en transe ou condition créatrice en me libérant de tout stimuli extérieur. Je fais le vide en moi même à la manière des chamanes, ce qui me permets d’interagir entre ce monde et celui des morts. Il se passe la même chose quand je peints avec mon sang, ma plaie est comme une porte ouverte sur l'autre monde, celui que je tend à retranscrire en images et ondes sonores.

8) Tu es également un artiste confirmé et prolifique. Tes oeuvres sont d'ailleurs très personnelles et sombres. Que représente la création pour toi ? Et peux-tu nous parler de ce processus de peinture avec ton sang ?

La création, au sens général du terme, est pour moi une catharsis, un moyen de libérer ce flux acide et destructeur qui gît au fond de moi. Ainsi, les peintures que je réalise avec mon sang sont la quintessence de cette démarche. Je me coupe le poignet avec une lame afin d'en extraire le sang avec lequel je retranscrit mes visions et rêves. Il s'agit d'un processus, une sorte de rituel en somme, la plaie étant comme une porte ouvrant sur un dialogue entre ma chair et l'au delà.

9) Tu effectues depuis des années des artworks pour différentes formations dans le milieu Black Metal (entre autre Drowning the Light, Monarque, Sarke, Atra ou encore Drohtnung). Comment cette connexion avec le milieu du metal noir s'est-elle faite ?

J'ai contacté à l'époque Azgorh de Drowning the Light qui a accepté mes services et depuis je reçois beaucoup de demandes de la part de l'underground. J'essaye d'apporter quelque chose de différent avec une symbolique particulière.

10) Que penses-tu de la scène Black Metal de nos jours ? Et quelle est ta vision de cette musique ?

C'est une scène vaste, internet facilitant les choses. J'estime que cet art se doit d'être la manifestation de la négativité qui repose au sein du créateur. Le terme de rituel, j'y reviens, est essentiel selon moi, car il met en exergue cette part sombre qui devient par ce processus, une entité propre.

11) Y aura-t-il d'autres albums ?

Ce concept de trilogie est présent dès le début, je n'en ferai que trois, le projet étant mort né. Le premier ANTI est la négation de tout, Le deuxième NEKRO est une ôde au cadavre pourrissant, et enfin ZERO sera l'ultime disque de l'anéantissement le plus total, il ne restera RIEN.

12) Je te laisse le mot de la fin.

Merci infiniment pour ton soutien et l'intérêt que tu portes à K.F.R !