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Jeudi 27 Juin 2013 - 11:32:59
Chap1: Burning Angel


These are dark times
Suspicious minds Breed like rats.
Guardians of Corrupt morality
Spread their filthy lies again ...


Après plusieurs heures de marche, la taïga s'arrêtait brusquement. Sans aucune logique, la haute forêt cédait sa place à une série de petits vallons, eux-mêmes rapidement remplacés par une plaine de glace. A l'extrémité de cette dernière, une chaîne montagneuse brillait sous un soleil rasant. Jetés au milieu des vallons, des bosquets d'arbres semblaient avoir été placés ici dans le Seul but de combler un vide trop angoissant. Cette volonté n'avait cependant pas réussi à chasser l'impression d'espace et d'isolement qui dominait les lieux.   

  Des pics rocheux fermaient trois des côtés de la péninsule. Les eaux glaciales de la mer du nord venaient s'y briser. La violence des courants et les arrêtes tranchantes de la roche rendaient tout accostage impossible. La majesté du paysage n'avait d'égal que son hostilité. L'ensemble ressemblait à une image d’Épinal sortie tout droit d'un conte pour enfant.

    Trois mois par an, un ersatz de printemps réchauffait la péninsule. La Toundra se recouvrait d'herbe tendre et de fleurs multicolores. Une débauche frénétique de couleurs et de vie se réveillait avant de se figer à nouveau dans un décor de givre. La glace et le froid reprenaient alors leurs droits pour le reste de l'année. Blancheur et Silence en étaient les maîtres mots. 

    Ces conditions extrêmes avaient déterminé son choix. Elle s'y était exilée, fatiguée de la compagnie des hommes. Au fil des années, elle avait perdu toute empathie pour la race humaine. Elle ne voyait plus en eux qu'un ramassis de tartufes cachés derrière une armada de convenances, portant bonnes moeurs et bonnes manières comme des étendards, condamnant à l'infamie tous ceux qui déviaient de « Leur » droit chemin. Mais rongés par l'envie, crevant sous le poids de la jalousie, ils déversaient leur haine derrière des masques de probité, sanctifiant la morale mais s'empressant de la fouler au pied derrière les portes closes de leur demeure. Plus la morale publique était vertueuse, plus les bordels fleurissaient. Plus les discours appelaient aux bonnes moeurs, plus les exutoires étaient morbides.

   Leur vrai visage se révélait lors des exécutions publiques. Ils se regroupaient, masse grouillante, serrés les uns contre les autres, se touchant, se frôlant, la concupiscence déformant leurs traits. Vibrant d'une fièvre malsaine, ils attendaient. Lorsque le condamné apparaissait, la foule se déchaînait. Vociférant, éructant, bandant. Ils ne faisaient plus qu'un. Chacun poussant l'autre, l'accompagnant, l'encourageant dans la monstruosité. Tous complices donc tous innocents.

    Toute la ville réclamait sa ration de sang. Se rejoignant dans une extase morbide lorsque le bourreau enflammait le bûcher. Savourant chaque étape du supplice du pauvre bougre, ils assistaient, avides, à la transformation des suppliques en hurlements et des hurlements en silence. Lorsque la mort délivrait le « monstre » de ses souffrances, ils retournaient à leurs occupations, rassasiés, puant la mort, attendant avec impatience la tombée de la nuit l'excitation chevillée au corps. Ce soir, de nouveaux êtres seraient ensemencés dans le sein de leur mère. Fils et filles de la laideur humaine. Et, indécence suprême, les os du condamné seraient vendus à prix d'or comme talisman. Misérable.

    Elle consomma sa rupture avec le monde des hommes lors d'une tentative d'annexion de son territoire par un des nobliaux frontaliers. Elle avait sollicité une audience afin de lui demander de renoncer à son projet. Il lui avait ri au nez, lui proposant d'intégrer son harem en dédommagement. Elle s'était retenue de ne pas lui trancher la gorge. Trop de gardes. Ils l'auraient transpercé de flèches avant même qu'elle puisse sortir son épée du fourreau. Ravalant sa rage, elle rentra chez elle préparer son offensive.

    Elle l'avait défié de venir la chercher dans ses montagnes, arguant qu'il était bien trop couard pour oser les escalader. Elle savait qu'il relèverait le défi. Ce genre d'hommes était tellement imbu d'eux mêmes qu'ils étaient prêts à toutes les stupidités surtout si le défi venait d'une femme. Comme elle l'avait prévu, il se lança à l'assaut des contreforts. Lorsque l'armée fut à mi-chemin, elle déclencha une avalanche. La coulée engloutit les hommes. Une poignée de survivants tenta de se dégager de la gangue de neige mais désorientés et paniqués, ils étaient des proies faciles et elle, une chasseuse implacable.

Ce soir là, elle rentra chez elle un goût de sang dans la bouche, son bras tremblant de s'être tant de fois abaissé pour donner la mort.

     Des patrouilles furent envoyées pour savoir ce qu'il était advenu. Ne trouvant ni corps ni traces de bataille, l'idée d'une intervention surnaturelle fit son chemin. Au cours des mois suivants, elle veilla à alimenter cette théorie en effrayant les quidams qui s'aventuraient sur son territoire. Pour ce faire, elle utilisa ses connaissances en chimie et l'art de la mise en scène théâtrale.  Au bout de quelques mois, légendes et histoires en tout genre circulèrent dans la région. Les lieux furent déclarés maudits. 

    A partir de ce moment, rare furent ceux qui s'aventurèrent au-delà de la forêt. Les plus audacieux montaient leur campement au niveau des premiers vallons mais jamais plus loin. La peur lui garantissait sa tranquillité. Elle avait déterminé une stratégie bien précise pour maintenir cet état de fait. Si les intrus n'avaient pas quitté les lieux au bout de trois jours (temps moyen d'une partie de chasse dans la région), elle déclenchait les hostilités. Rien de bien méchant, tours de passe passe, mise en scène fantasmagorique suffisamment effrayante pour des esprits superstitieux. En général, ils déguerpissaient à l'aube, terrifiés. Par contre, s'ils ne comprenaient pas la manière douce et persistaient à violer son territoire, la mort était la finalité à leur entêtement. Par deux fois, elle avait dû en arriver à cette extrémité. Durant quatre jours, elle avait joué sa petite comédie mais rien ne semblait les effrayer. Un matin, l'un d'eux s'était même rapproché dangereusement de sa demeure de pierre et avait failli la voir. Sa réaction fut brutale et définitive.

Comme sur son nouvel univers, une chape de glace s'était déposée sur son coeur.



Jeudi 27 Juin 2013 - 11:33:47
Chap 2 : I'm Legend / Out for Blood

I am after you
A Shadow on The Hunt
Don't turn around
I am right behind you ...


Lorsqu'elle avait pénétré dans la grotte principale, elle avait tout de suite compris son  potentiel. De son centre partait un réseau de sources chaudes qui irriguaient toute la partie sud de la montagne. La température élevée, la hauteur de plafond et le puits de lumière naturelle qui l'éclairait en faisait une serre gigantesque. Elle avait fait déplanter les arbres et les plantes de son ancienne demeure pour en garnir son nouveau jardin. Il lui avait fallu beaucoup de temps et d'effort pour les transporter et les replanter. De nombreuses plantes ne supportèrent pas le voyage ou leur nouvel environnement mais au final le résultat était somptueux.

Sa chambre était relié à la serre par un étroit corridor. Une ouverture sur la partie gauche, donnait sur un promontoire.
Lors des tempêtes et des blizzards, elle en condamnait l'accès par des panneaux de bois. Le reste du temps elle les laissait ouvert. La forme en entonnoir de la grotte et le ruisseau  d'eau chaude qui en barrait l'entrée, empêchait le froid de pénétrer à l'intérieur. Dans un renflement de terrain, une petite Mare c'était formée et elle s'y baignait la nuit tombée. Enfermée dans une bulle de chaleur, elle écoutait le silence. Cela lui rappelait son séjour dans une ville du sud où  des termes à ciel ouvert avait été aménagées. La différence étant qu'ici c'était le froid qui l'entourait et non pas la chaleur moite d'une nuit d'été.

Plongée dans son livre, elle n'était pas sortie depuis plusieurs jours. Elle se déplia plus qu'elle ne se leva. Un bain dénouerait ses muscles ankylosés. Elle posa son livre et se dirigea vers la terrasse.

L'incrédulité l'a fit cligner des yeux. Un feu illuminait les abords de la plaine. Un feu. Un feu sur SES terres. A une encablure de SA grotte. Mais quelle était donc la bande de mécréant qui venait spolier son territoire en toute impunité. Un frisson de Rage descendit le long de sa colonne vertébrale.
Ulcérée elle traversa sa chambre à grandes enjambées. Elle courrait presque en atteignant l'armurerie. Elle y saisie épée et arbalète. Sa colère et sa Rage grandissaient à chaque pas. Elle arriva en courant aux écuries et sauta à cheval.

La vitesse et le froid lui permirent de retrouver son sang froid. Elle dirigea son cheval vers la droite afin de contourner le campement. Elle dissimula l'animal et continua à pieds. A proximité de son objectif, elle s'allongea dans la neige. Plusieurs dépouilles de loups et d'ours séchaient écartelées sur des cadres de bois. Les chasseurs étaient une petite dizaine. Tous dormaient regroupés autour du feu. Cette fois pas de finasserie.

Deux gardes surveillaient les abords du camps. Ils étaient à l'opposé l'un de l'autre et se tournaient le dos. Parfait. Elle se rapprocha encore un peu, arma son arbalète et tira. Les deux premiers carreaux furent pour eux. Ils s'écroulèrent sans un bruit. Elle enchaîna les tirs. Trois hommes de plus étaient mort quand elle sentie la pointe d'une épée sur sa gorge. Trop concentré sur ses tirs elle n'avait pas entendue l'homme s'approcher d'elle.

La première gifle lui fit perdre l'équilibre mais avant qu'elle ne touche terre, une deuxième la ramassa en plein vol. Ballottée de l'un à l'autre,elle ne parvenait pas à éviter les coups qui arrivaient de toute part. Un, plus violent que les autres la projeta en dehors du cercle de ses assaillants. Un des hommes s'écarta du groupe pour venir la chercher. Elle en profita pour saisir un tison et lui planter dans la carotide. Il s'écroula sur le feu. Les quelques secondes de flottement qui s'en suivirent lui permirent de se relever. Dans sa fuite, elle saisit un épieu. Se rendre n'était pas une option. Elle ne voulait même pas penser à ce qu'ils lui feraient s'ils la  prenaient vivante.

Elle parvint à reculer jusqu'aux cadres de séchage. Les structures de bois les empêchaient de l'attaquer tous en même temps et lui permettait de garder un certain contrôle de la situation mais elle ne pourrait pas tenir longtemps. Ils frappaient chacun leur tour,se relayant dans une sarabande infernale. Les premiers signes de fatigue se firent rapidement sentir. Ses mouvements commençaient à être plus lents et plus douloureux. L'épieu  était trop grand,trop lourd. Le soulever lui demandait deux fois plus d'effort qu'avec son épée. Il fallait qu'elle trouve une solution pour rompre le combat et fuir.

Elle donna un coup d'épaule dans un des cadres qui s'effondra sur ses assaillants. Tentant sa chance, elle partie en courant à travers les vallons.

Après s'être assuré de les avoir semé, elle s'arrêta et repris son souffle. Elle ne pouvait pas les laisser quitter la péninsule. Ils reviendraient plus nombreux pour une chasse aux sorcières. Elle devait les éliminer mais pour l'instant elle en était physiquement incapable. Fatiguée et endolorie de toute part, elle récupéra son cheval et rentra soigner ses plaies. Elle espérait que leur esprit de vengeance et leur orgueil, les inciteraient à rester pour la traquer. Persuadé d'être les chasseurs, ils n'imagineraient pas une seconde qu'ils jouaient son jeu et que de chasseur ils deviendraient gibier.

Pour chasser courbatures, plaies et ecchymoses, elle pris un bain et se pommada de la tête au pied mais l'heure du repos n'avait pas sonné. Elle devait retourner là bas afin de connaître leurs intentions et déterminer un plan d'action. Avant de partir, elle prit une petite pincée
d'une vieille compagne de route. Efficace mais mortelle, elle ne s'en servait que dans des cas extrêmes et à très petite dose. Elle lui permettrait de rester vigilante et alerte malgré le manque de sommeil. Petit plus non négligeable,vu les circonstances, elle avait toujours exacerbé sa perversité.

Elle mis à profit les quelques heures qui restaient avant l'aube pour aller espionner son gibier. Ils étaient cinq dont un blessé. Les cadavres étaient entassés à l'extérieur du camp et semblaient tenir conseil. Elle sortie son arbalète et tira. Un des hommes s'écroula en avant. Les autres sautèrent sur leur pieds et éteignirent le feu. Ils n'oseraient plus le rallumer. Quelques heures dans le noir et le froid, à sursauter au moindre bruit, devrait entamer leur moral et leur force.

Elle maintint la pression toute la nuit.Elle avait repris des forces et tout cela l'amusait follement. Même s'ils décidaient de fuir, le temps de charger leur bardas et d'atteindre l'une des passes, cela lui laissait plusieurs heures de répit. Elle décida d'aller dormir un peu.

En milieu de matinée, elle retourna les observer. Ils avaient brûlé les cadavres et plié bagages. Elle les laissa lever le camp et les suivit à distance afin de voir quelle direction ils prenaient. Au bout de quelques kilomètres leur itinéraire ne faisait plus aucun doute. Elle les devança et commença son travail de sape. Elle bloqua certain accès pour les amener à prendre le chemin le plus long et le plus chaotique. Ils ne devaient pas atteindre la forêt avant la nuit. Elle voulait les garder chez elle, sur son territoire.

S'ils avaient abandonné leur chasse, ils seraient restés en vie.  Leur montures auraient pu couper à travers les vallons. Pas des chariots. A la nuit tombée, ils n'avaient toujours pas atteint la lisière de la forêt. Épuisés par la difficulté de la route, ils montèrent leur campement au milieu d'un vallon. Dans leurs mouvements et le timbre de leur voix, elle pouvait sentir la peur et la fébrilité qui les animait.

Elle cibla ses victimes avec des petites billes contenant une peinture phosphorescente. Tranquillement elle attendit la nuit .

De nouveau elle arma son arbalète et tira. Le premier garde tomba raide mort.
Le deuxième réveilla ses compagnons dans un cri et comme la veille éteignit le feu. Elle lança une grenade fumigène au milieu du campement. Dans un bruit assourdissant une fumée rouge se répandit dans le camps. Effrayés, ils s'enfuirent chacun de leur coté. La chasse était ouverte. Les villageois avaient créé une légende. Elle allait lui donner corps. Grands méchants loups, prenez garde, ce soir le petit chaperon rouge a les dents et les griffes bien plus longues que les vôtres.

L'aube se leva et elle avait faim. Malgré la fatigue, elle décida de s'arrêter pêcher. Elle remonta un petit sentier jusqu'à un bosquet d'arbre. Après y avoir attaché son cheval, elle redescendit vers la rivière. Une douleur foudroyante lui scia le cerveau. Elle s'effondra en hurlant. Lorsqu'elle finit par intégrer la douleur, elle se redressa. Un piège à loup lui dévorait la cheville.

Comme une idiote, elle avait laissé son épée attachée à sa selle. Prise de panique, elle chercha de quoi desserrer les mâchoires de métal.  Elle devait faire vite. A n'importe quel moment un loup ou un ours pouvaient arriver et elle finirait en panier repas.Elle ramassa une branche, la glissa entre les dents et poussa. Elle réussit à les écarter de quelques centimètres avant que le bois ne rompt. La violence de la douleur l'a fit vomir.

Après avoir hurlé de douleur, elle hurla de rage. Elle allait mourir, prisonnière d'un des pièges posé par les hommes qu'elle venait de tuer. Elle pleura. Vidée, elle resta inerte de longues minutes.
 
Elle passa le reste de la journée à tenter de trouver une solution, tirant, secouant, sursautant au moindre bruit. La nuit commençait à tomber. Elle avait faim, elle avait peur et la température chutait mortellement. Le point positif était que le froid avait endormie son membre endolorie et évité qu'elle perde trop de sang. Le point négatif était que ce même froid la tuerait plus sûrement que le piège à loup. En même temps, à choisir entre mourir de faim ou dévoré vive, ne plus se réveiller n'était pas la pire des solutions.



Jeudi 27 Juin 2013 - 11:34:33
Chap 3: I Want You

I want you
I want you so bad
I want you,
I want you so bad
It’s driving me MAD, it’s driving me ...
She’s so heavy heavy, heavy, heavy.


A la sortie de la forêt, son cheval devint nerveux et se mit à hennir et à piaffer. Avec quelques instants de retard sur l'animal, l'odeur lui envahit la gorge. Scrutant les alentours, il aperçut les restes d'un bivouac.  Méfiant, il sorti son épée et se rapprocha. Un cadavre, à moitié brûlé, jonchait le sol. Sa tête reposait au milieu d'un tas de cendres encore incandescentes répandant une odeur de chair brûlée écœurante. Il descendit de cheval, s'approcha et retourna le cadavre. L'odeur. Violente. Le métal d'un carreau d'arbalète dégoulinait le long des orbites nettoyées par les flammes. L’œil, remplacé part un charbon ardent, donnait l'impression que le cadavre le regardait de par delà l'enfer. Il suffoqua et toussa.

Il reconnu les armes d'un des chasseurs qu'il avait croisé au bourg voisin. Les traces de trois autres personnes partaient dans des directions opposées. Par contre celles des chevaux venaient toutes du même endroit. Il décida de suivre la piste des animaux. S'ils venaient tous de la même direction, il avait une chance de remonter jusqu 'au campement principal. Il pourrait toujours signaler la mort de leur compagnon aux autres. 
 
Avant même d'arriver, il comprit que le camp était vide. Ni feu ni bruit. Des marques de combats étaient encore visibles: traces de sang, cadre de séchage à terre. Des carreaux d'arbalète jonchaient le sol, les mêmes que celui du premier campement. A l'écart, les restes d'un bûcher continuaient à fumer. Des os humains étaient mêlés aux cendres. Il dénombra cinq crânes. Quelque chose clochait. Les empreintes n'étaient pas assez nombreuses. Cinq hommes étaient morts, un combat s'était engagé et pourtant il ne comptait que onze paires de pas alors qu'une telle hécatombe supposait plusieurs hommes. Onze paires dont une de la taille de celle d'un enfant. Troublé par ce détail, il retourna à son cheval. Il n'avait plus rien à faire ici. 

        Il décida de rejoindre une de ses anciennes bases de chasse pour la nuit. Il était trop tard pour retourner en arrière.  
  
Au détour d'un vallon, il aperçut une superbe Frison attaché à un arbre. Comme tous ceux de sa race, il était relativement massif et avait une robe noire et de longs crins magnifiques. Il sortie de nouveau son épée, mis pied à terre et s'approcha. Le cheval appartenait peut être à l'enfant ou à un des chasseurs. L'animal se mit à hennir en l'apercevant. Il était presque parvenu à sa hauteur lorsqu'il buta sur quelque chose.
 
L'enfant était allongé dans la neige, emmitouflé dans un manteau blanc. Dans la pénombre il ne l'avait pas vue. Il se pencha sur le corps et remarqua le piège à loup qui lui emprisonnait la cheville. Il s'agenouilla et rabattis la capuche pour lui dégager le visage. Ce n'était ni un des chasseurs, ni un enfant qui gisait dans la neige mais une femme. Son visage était d'une pâleur mortelle et sa peau commençait à devenir cireuse. Il chercha son pouls sans succès. Il approcha son épée de ses lèvres. Un léger souffle embua la lame. Elle n'était pas morte mais en hypothermie. 
 
Un cadenas fermait la chaîne. A l'aide d'un poinçon, il s'attaqua  à la serrure. Il lui fallut une petite poignée de minutes pour en venir à bout.  Une fois son travail achevé, il se releva et se dirigea vers le cheval de la femme. Il le détacha et noua les rennes aux fontes de sa selle. Puis il revint près du corps, le chargea sur son cheval et monta en croupe pour le maintenir. 

Arrivée à l'entrée de la grotte, il la déposa dans la neige afin de  la maintenir en hypothermie. Il se servirait de son état comme anesthésique et éviter une hémorragie quand il ouvrirait le piège. Mais avant tout, il devait faire un feu et aménager un lit afin de pouvoir la réchauffer au plus vite après l'opération. Il avait l'avait installé un peu à l'écart du feu. Il devait la réchauffer doucement et ne pas exposer sa peau à une source de chaleur trop directe. Un réchauffement trop rapide risquait de créer un refroidissement plus intense, par réaction physiologique, et donc la mort.  

Il retourna auprès d'elle et commença par découper la botte afin de se faire une idée de la blessure. L'épaisseur du cuir, la tige de maintien et l'épaisseur de la fourrure, avaient limité les dégâts. La chaire était entamée mais l'os n'avait pas été touché. Il desserra le piège, nettoya et recousue la plaie. Elle n'avait pas cillé ce qui l'inquiéta. 
  
Il la transporta à l'intérieur, l'allongea sur le lit, lui ôta ses vêtements humides et  la recouvrit de fourrure pour la réchauffer. Il était tenté de la frictionner mais il attendit patiemment que sa peau retrouve un semblant de coloration. IL ne voulait pas risquer de créer des lésions en frottant des parties où des engelures auraient pu se former. De cireuse, sa peau devint simplement pâle. Il commença alors à la masser avec précaution jusqu'à ce que ses joues reprennent quelques couleurs. Il la recouvrit de nouveau et se leva. A présent il ne pouvait rien faire d'autre qu'attendre.
 
Il sortie de la grotte pour s'occuper des chevaux. Pendant à la selle de la femme, il remarqua un carquois. Il l'ouvrit. Des carreaux d'arbalète. Nul doute possible c'était les même que ceux qui avaient tué les chasseurs. Il referma le carquois et retourna dans la grotte. Il s'approcha d'elle. Son souffle était faible mais régulier. Il la dévisagea. 

Il installa son lit de l'autre coté du feu. Par prudence il avait enlevé tout ce qui pouvait servir d'armes et se coucha son couteau à la ceinture et son épée à ses cotés. Ce soir il ne dormirait que d'un œil.
Plusieurs fois dans la nuit, il vérifia si elle respirait toujours. Au matin, il profita de son sommeil pour aller chasser. Tout indiquait que les traces de pas qu'il avait pris pour celles d'un enfant étaient les siennes ainsi que les carreaux d'arbalètes qui avaient tués les chasseurs. Pourquoi? Pourquoi avait elle tué autant d'hommes?
 
Elle n'était plus dans la neige. Ce fut sa première pensée. Elle n'était plus dans la neige et une chaleur bienfaisante lui caressait la peau. Elle se redressa et regarda autour d'elle. Elle était dans une grotte, installée près d'un feu, ses habits pliés à ses cotés. Elle repoussa les couvertures et examina sa cheville. La plaie avait été recousue avec soin. Un déluge de questions envahit son cerveau: Qui? Comment? Pourquoi? 
Personne ne venait jamais ici. Les chasseurs étaient tous mort et de toute façon il l'aurait achevé pas sauvé. Alors qui? Une patrouille à la recherche des autres? Pas si vite pas si tôt et puis cela faisait bien longtemps qu'ils n'envoyaient plus personne à la recherche des disparus. Et si c'était le cas alors pourquoi la sauver? Pour la ramener au village et ainsi donner un visage à la malédiction avant de l'exécuter?

Instinctivement elle chercha ses armes. Rien, ni près d'elle ni ailleurs. Elle se leva d'un coup, effrayé par sa vulnérabilité. Prise d'étourdissement, elle tituba. S'appuyant contre le mur, elle attendit que le monde reprenne sa place. Respirer, laisser son corps se réhabituer à la position verticale. Elle devait contenir son impatience. Les quelques minutes perdues maintenant étaient des minutes gagnées pour la suite. Elle s'habilla doucement.
 
Son cheval était attaché à quelques mètres de là. Avec soulagement, elle aperçue son épée. Elle enfila son manteau et sortie. Le craquement d'une branche la fit sursauter. Elle tourna la tête et aperçu un cavalier. Elle se lança vers sa monture aussi vite que sa blessure le lui permettait. Au bruit du pas de l'animal, elle comprit que le cavalier venait de le mettre au trot. Elle aurait voulu courir et au lieu de cela elle traînait la jambe comme une vieille femme. Son corps ne répondait pas aux injonctions de son cerveau. Elle avait l'impression d'être dans un de ces cauchemars où nos pieds sont de plombs.
 
La femme se tenait à l'entrée de la grotte. Quand elle l'aperçu, elle se précipita vers son cheval. Il accéléra la cadence. Ils arrivèrent au même moment. Le temps qu'il saute à terre, elle avait saisit son épée. Il la savait trop faible pour soutenir un combat mais la prudence était de mise. Il avait à peine touché terre qu'il dû esquiver un premier coup. Le deuxième suivi aussitôt. Il s'en était fallu d'un rien.
Elle parvint à la hauteur de sa selle, saisit son épée et se retourna. Mon dieu qu'elle lui semblait lourde. Elle ne pourrait jamais combattre. Sa seule chance était d'attaquer la première. Si elle lui laissait le temps de réagir, elle était perdue.
 
Resserrant ses mains autour du pommeau, elle attaqua. Dans le même mouvement elle enchaîna deux coups. Il esquiva le premier et para le deuxième. La violence du choc lui raisonna dans tout le bras. D'un mouvement sec il l'a repoussa. Cette pichenette suffit à la faire reculer. Trahis par sa cheville, elle tomba à la renverse. Elle n'avait pas lâché son épée et la brandit devant elle pour se protéger. 
 
Et maintenant: Prisonnière ou cadavre en sursis?
 
Il s'avança. Elle recula paniquée.
"Je vous ai trouvé hier dans la neige."
Pas de réponse.
"Je ne vous veux aucun mal"
Rien.
 
Il rangea son épée et lui tendis la main pour l'aider à se lever. Elle se recula encore. Comprenant qu'il ne servait à rien d'insister, il prit son cheval par la bride et retourna vers la grotte. A petit pas, il la vit se diriger vers sa monture et monter en selle. 
 
Elle ne prit pas la peine de se dévêtir et s'allongea sur son lit. Son visage avait à peine touché l'oreiller que déjà elle dormait. Lorsqu'elle se réveilla, la douleur la rappela à l'ordre. Elle se leva en boitillant. Doucement elle déposa son pied endolorie sur un petit tabouret. Elle remonta son pantalon et examina sa cheville. La cicatrise était belle. Les chaires n'étaient pas boursouflées, ni érythème ni inflammation. Il avait fait un excellent travail. Elle prit un flacon et l'ouvrit. Du bout des doigts elle étala délicatement la pommade sur sa cheville. La cicatrise disparaîtrait d'ici quelques jours.
 
Un halo de fumé entourait la source chaude. Elle pénétra dans l'eau. Son corps et son esprit se délassèrent instantanément. Ici elle oubliait tout. La fureur et le sang, le monde et sa cohorte d'imbécile. Peut importe ce qu'ils pensaient, ce qu'ils faisaient ici tout n'était que calme et volupté. Elle était hors de leur atteinte. Elle ne prit pas la peine de se rhabiller pour retourner à l'intérieur. La morsure du froid sur sa peau la fit frissonner. Elle fit un énorme feu puis enleva le plaid du canapé et l'étala devant la cheminée. Elle s'allongea et se rendormit.

La faim, la sortie de son sommeil. Elle dévalisa la cuisine et prit le corridor menant au jardin. Framboises, fruit de la passion, groseilles viendraient achever son repas. Elle s'assit au pied d'un arbre et remua ses orteils dans l'herbe afin dans éprouver la douceur. Elle étala son festin devant elle et commença à manger. Une fois repue, elle se concentra sur sa cheville. Le baume avait déjà fait son effet. Elle ne sentait quasiment plus de douleur lorsqu'elle posait le pied à terre. Une semaine et elle serait totalement rétablie. Elle retourna dans le salon et récupéra son livre qu'elle avait abandonner sur l'accoudoir du fauteuil. Rien. Il ne s'était rien passé. Elle avait déjà oublié leurs visages.

Sa convalescence fut douillette et agréable mais rester trop longtemps enfermé la rendait neurasthénique. Il était temps qu'elle sorte. Le froid était vif mais tout à fait supportable. Elle talonna son cheval et parti au galop vers son terrain de chasse favoris. Les traces d'un caribou se dessinaient très nettement dans la neige. Elle les suivit un petit bout de temps. Elle aperçut l'animal. Elle était trop loin pour tenter de décocher une flèche et rien ne permettait de se dissimuler pour se rapprocher. Elle descendit de cheval et se plaça le long de ses flancs. Ainsi caché et son odeur couverte par celle de sa monture, elle pourrait s'approcher suffisamment pour pouvoir tirer. Sa ruse fonctionna. Le caribou ne se méfia pas et resta tranquillement à boire. Arrivé à 50 mètres de sa cible, elle arrêta son cheval, prit son arc,visa et tira. Elle le toucha en plein cœur. L'animal s'écroula sur place. Elle rangea son arc et s'approcha. Elle le dépeça, gardant les meilleurs morceaux pour elle et laissant les autres au bons soins des charognards. Elle détacha de l'arrière de sa selle un petit traîneau. Elle le fixa avec des lanières et y déposa son butin.

La journée de chasse avait été fructueuse et sa cheville ne l'avait pas du tout fait souffrir. Elle sortie sur la terrasse. Des aurores boréales illuminaient le ciel. Elle s'installa sur le promontoire afin de profiter du spectacle tout en dégustant son repas.

Malheureusement, sa tranquillité fut de courte durée. Lors d'une promenade, elle croisa les traces d'un cheval. Elle remonta la piste afin de déterminer l'emplacement du bivouac et au fur et à mesure de sa progression elle se rendit compte qu'elle la menait tout droit à la grotte où l'homme l'avait soigné. La nuit n'allait pas tarder à tomber mais elle décida de continuer. Une petite voix lui murmurait qu'il était revenu. La perspective de cette éventualité la perturbait. 


Elle stoppa son cheval. La grotte était éclairée. Il était assis en tailleur à coté du feu. Pourquoi était il revenue? Sa bêtise allait la contraindre à tuer l'homme qui l'avait sauvé. Stupide bestiole. Elle sortie son arbalète et visa. Elle rabaissa son bras. Elle ne pu se résoudre à tirer. Il lui avait sauver la vie. Il méritait de pouvoir se défendre et non pas d'être abattue comme du gibier. Elle prit son épée et se dirigea vers l'entrée. 


Il était parti à la fin de la semaine, comme prévu, mais au lieux de quitter le pays, il avait prit la direction de la péninsule. Au cours de son séjour dans le bourg, il avait entendu les rumeurs et les légendes qui circulaient sur la péninsule. Leur horrible démon était en fait un petit bout de femme de rien du tout. La curiosité l'avait titillé et il était revenu. Il s'installa dans la même grotte. Il était sure qu'elle finirait pas le repérer. Immanquablement elle remarquerait ses traces de pas ou celles de son cheval. Peut être même que depuis son abris elle verrait le feu. Il pensait qu'elle avait trouvé refuge dans les montagnes. D'un point de vue stratégique c'était idéal. En hauteur et difficile d'accès. Il avait pris un risque en revenant. Il ne doutait pas qu'elle puisse vouloir le tuer. Il fallait juste espérer qu'elle ne choisirait pas l'option carreau d'arbalète en plein front. 

Il entendit le craquement de ses pas dans la neige. Elle apparut sur le seuil, laissant tomber son manteau à ses pieds tout en s'aançant vers lui. Échevelée, ses joues rougies par le froid faisaient ressortir la blancheur de sa peau. Elle ressemblait à ses poupées de porcelaine pour petites filles sage sauf que celle-ci tenait une épée à la main et qu'elle savait s'en servir. Il ne bougea pas. Si elle était venue jusqu'à lui c'était pour le défier. Elle ne ferait rien tant qu'il serait désarmé. Elle s'arrêta à quelques centimètres de lui. Elle ne l'avait pas lâché des yeux depuis son arrivée. Son regard était dur. Elle le fixait, les lèvres closes.

Il avait du l'entendre arriver car il ne semblait pas surpris de la voir. Elle se débarrassa de son manteau et s'avança vers lui. Elle s'attendait à ce qu'il dise quelque chose ou au moins qu'il se lève pour prendre son arme mais il resta là sans bouger, soutenant son regard. Elle s'arrêta si près de lui que la pointe de son épée venait effleurer ses genoux.

Aucune réaction, pas un mot, juste son regard accroché au sien. Ils restèrent de longues minutes à se dévisager. Chacun scrutant le regard de l'autre. Ne sachant pas pourquoi il était revenu, ne sachant pas pourquoi elle ne le tuait pas.

Soudain un envie terrible la saisit. Elle s'agenouilla rapprochant son visage jusqu'à ce que leurs lèvres furent près de se toucher. Ce n'était pas un baiser juste une caresse. Elle s'approcha encore un peu. Elle le mordit doucement comme pour l'inviter à participer.

Chaque baiser, chaque pression de ses mains ne faisait que l'enflammer davantage. Entre deux baisers, elle lui enleva sa chemise. Ses mains glissèrent le long de son torse et d'un geste elle le renversa en arrière pour lui ôter le reste. Elle resta un moment à le contempler.

D'un seul coup, elle s'était figée. Elle se tenait face à lui, les fesses posées sur ses talons sans rien faire, sans rien dire. Elle le regardait, le visage fermé ne laissant rien deviner de ses pensées. Soudain il eut peur qu'elle parte. Il se redressa et colla ses lèvres aux siennes. Il n'avait qu'une envie lui arraché ses vêtements mais il savait qu'à la moindre maladresse il risquait de finir avec un couteau sous la gorge. Doucement il remonta sa tunique le long de ses cuisses, contenant son impatience grandissante en ralentissant son geste de peur de se laisser emporter.

Ses mains se posèrent sur ses cuisses. La pression de ses doigts se faisait de plus en plus présente, presque douloureuse. La lenteur de ses gestes, la mettait à la torture. Son corps était tendu, impatient. Lorsque ses mains glissèrent sur ses fesses pour venir se nicher au creux de ses reins, elle laissa échapper un gémissement. Dieu du ciel, ne pouvait-il pas lui arraché cette satanée tunique? C'était un véritable supplice.

C'était la deuxième fois qu'il la voyait nue. La première fois, c'était un corps froid et inerte, un organisme auquel il devait redonner vie. Aujourd'hui, elle vibrait sous ses caresses. Sous ses doigts, il sentait la chaleur de sa peau et les battements de son cœur. Il la plaqua contre lui. Lorsque ses seins touchèrent sa poitrine il ne put se contenir plus longtemps.

Tous les soirs elle revint l'épée à la main. Tous les soirs elle finissait dans ses bras. Tous les matins elle repartait à l'aube sans prononcer une parole. Il pouvait lire le désir et la jouissance sur son visage. Elle s'abandonnait sans fausse pudeur mais il n'avait accès qu'à son corps. Son cœur et son esprit lui restaient totalement fermés. Il ne comprenait pas comment elle pouvait être à la fois si froide et distante et si passionné dans leurs étreintes. Juste qu'elle lui sourit. Il aurait aimé juste qu'elle lui sourit.



Mardi 09 Juillet 2013 - 11:52:22
Chap 4: When a Blind MAN Cries


Had a friend once in a room,
Had a good time but it ended much too soon.
In a Cold month in that room
we found a reason for the things we had to do.
I'm a Blind MAN, I'm a Blind MAN,
Now my room is cold.
When a Blind MAN cries,
Lord, you know he feels it from his soul...

Une neige épaisse tombait depuis 3 jours. 3 jours qu'elle ne pouvait pas sortir. 3 jours qu'elle ne l'avait pas vue. Ses baisers et ses caresses lui manquaient. Agacé par son sentimentalisme stupide, elle décida de soigner le mâle par le mal. Elle sortie des placards tout ce qu'elle trouva d'alcooliser et les disposa sur la table base. Elle hésita à aller chercher de l'herbe mais renonça. Cela avait toujours eu sur elle un effet aphrodisiaque et ce n'était pas le moment d'exacerber ses sens mais plutôt de les endormir. Elle s'installa confortablement et commença méticuleusement à se saouler.

Elle se réveilla d'un coup, tenaillée par une envie soudaine et dévorante. La neige tombait toujours mais faiblement. Malgré l'agglomération des nuages au sommet des montagnes et le Blizzard que cela présageait, elle descendit jusqu'aux écuries. Il fallait qu'elle le fasse. Elle ne pouvait pas attendre encore plusieurs jours que le mauvais temps se dissipe. Le cerveau encore fragmenté par l'alcool, elle sauta en selle.

Il dormait, elle le secoua avec rudesse. Il se réveilla en sursaut et la repoussa brutalement.
« Viens ».
Il commença à ouvrir la bouche mais elle ne lui laissa pas le temps de palabrer et tourna les talons pour se diriger vers son cheval. Son pas emboîta le sien.

Le sentir si près affolait ses sens. Dès qu'elle croisait son regard ou qu'ils se frôlaient, elle sentait sa peau et son sang palpiter de désir. Arrivée dans le salon, elle le prit par la main, le poussa sur le canapé et se mit à califourchon sur lui. Une boule de chaleur lui vrilla le bas ventre et remonta jusqu'à sa bouche quand elle l'embrassa.

Elle s'allongea savourant les dernières vagues de plaisir qui lui parcouraient le corps. Elle ne savait pas pourquoi elle l'avait embrassé ce jour là dans la grotte. Elle se souvenait juste d'avoir ressentie l'envie irrésistible de coller ses lèvres aux siennes.
Pourquoi? Elle n'avait pas de réponse et elle s'en foutait. Elle savait qu'un jour ou l'autre, il retournerait parmi les siens. Qu'il lui briserait le cœur. C'était inéluctable. Mais ça aussi elle s'en foutait. Elle prenait tout cela sans rien en attendre. Ce n'était qu'une parenthèse passionnée et passionnante mais éphémère.

Dès qu'elle s'était rendu compte qu'elle devenait accro à ses caresses, elle s'était posé la question : le congédier avant qu'elle ne s'attache de trop ou profiter de ces moments de voluptés et se préparer à pleurer. Elle avait choisi le plaisir et les larmes. Il y a des rencontres qui méritent que l'on souffre pour elles.

Cela faisait des semaines qu'ils couchaient ensemble et il ne connaissait toujours pas son nom. Malgré les baisers et les caresses, une certaine distance persistait. Il l'observa: étendu sur le canapé, elle s'étirait comme un chat au soleil. Aucune dureté n'assombrissait plus son regard. Du bout des doigts il suivit la courbe de ses hanches. Elle tourna la tête vers lui et le fixa tranquillement. Ses yeux pétillaient de malice. Elle lui sourit. Enfin. 

Un point lumineux se détachait sur l'horizon. Cette Apparition le pétrifia. Il ressentit cette intrusion comme une agression. Il aurait voulu la voire disparaître, l'effacer de son champ de vision. Il ne voulait pas de sa présence et de ce qu'elle impliquait. Depuis quelques mois, il vivait dans une chimère et il ne voulait pas se réveiller. Il avait presque réussi à oublier le monde extérieur dans le creux de ses reins. Dilué dans ses yeux et son sourire. Et ce soir, ce feu le ramenait vers une réalité qu'il ne voulait pas. Au même moment, il sentit sa présence derrière lui. Elle regardait dans la même direction. Son visage s'était durcit et il n'aimait pas ce qu'il y voyait. Son regard était vide de toutes émotions. Il avait presque oublié cette froideur en elle. Cette dichotomie entre la femme qu'il connaissait et celle qu'elle était à cet instant le
déconcertait. Froide et implacable. Il lui caressa la joue espérant ramener un peu d'humanité dans ses yeux. Au contact de sa main ses traits retrouvèrent toute leur douceur. Il la fit pivoter pour l'obliger à tourner le dos au promontoire. Elle se laissa faire, semblant elle aussi vouloir fuir la présence du feu. Elle posa sa joue au creux de sa main et se blottit contre lui. Elle fini par l'entraîner à l'intérieur. Il la suivit, priant pour que le feu ait disparu à leur réveil.

Le froid le réveilla. Elle n'était plus là. Il se leva et se dirigea vers la cuisine espérant l'y trouver. Personne. Il retourna dans la chambre et s'habilla en hâte. Il descendit jusqu'à l'armurerie. Son épée et son arbalète n'y étaient plus. Il couru jusqu'aux écuries sachant pertinemment que son cheval n'y serait pas non plus. Il sella le sien. Il savait où elle était allée. Chaque soir depuis trois jours, le feu réapparaissait. Petite chose insolente qui les narguait. Aucun d'eux n'avaient abordé le sujet mais tous les soirs elle vérifiait sa présence et partait là bas. Il connaissait le rituel, comprenait ses motivations mais il ne pouvait rester ici à l'attendre sans rien faire.

Elle descendait de cheval. Talonnant le sien de plus belle, il lui coupa la route. Ne prenant pas le temps de stopper sa monture, il sauta à terre et se planta devant elle. Il posa la main sur son arbalète. Il s'attendait à une réaction violente de sa part. Au lieu de cela elle déposa délicatement sa main sur la sienne entrelaçant leurs doigts. Ils restèrent quelques instant ainsi, savourant le contact de leurs peaux. Elle raffermit sa prise et souleva sa main jusqu'à son visage. Du bout des lèvres elle effleura sa paume. Ses gestes et son regard étaient empreint d'une mélancolie qu'il ne lui connaissait pas. Il la laissa passer.
 
Elle n'avait jamais ressentie de culpabilité. Elle défendait son territoire des intrus indésirables comme n'importe quel animal. Sauf que dans son cas, la plupart du temps, ses congénères étaient trop stupides pour fuir aux premiers signes de mise en garde et persistaient jusqu'à la mort. Mais ce soir elle redoutait les conséquences de son acte. Elle resta longtemps assise dans la neige n'osant pas retourner à son cheval. Elle avait peur de ce qu'elle trouverait ou plutôt ne trouverait pas.

Elle fini par se lever. Chaque pas lui coûtait. En haut de la crête elle s'arrêta. Encore un pas.

Quelque chose en elle se décrocha et tomba au plus profond de son être. Un creux dans le coeur. Un creux dans le ventre. Elle reprit sa marche. Son cheval henni à son approche. Elle lui caressa la joue maintenant son museau contre son épaule. Le souffle chaud de l'animal, dans son cou, lui fit du bien. Elle resta de longues minutes ainsi, aspirant la chaleur de l'animal, laissant libre court à ses larmes.  Elle rentra à pied coller à l'encolure de sa monture, des sillons de sel lui barrant les joues. Elle avait froid ...

A l'entrée des écuries ce même creux à l'estomac. Elle avait espéré. Tout le long du chemin elle avait espéré. Ralentissant le pas, repoussant le moment de vérité. Tant qu'elle était là à marcher, elle pouvait y croire. Mais il n'était pas là. Parti. Définitivement. Irrémédiablement. La parenthèse c'était refermée. Sans bruit sans heurt. Conclusion d'une passion fugace et gracile. Ce soir elle avait perdu plus qu'un amant, un ami. Tout était de sa faute, elle l'avait invité à rester, elle l'avait invité à partir.
 








Jeudi 11 Juillet 2013 - 11:03:10
Chap 6 - Try Me

Try me, oh let me be The One
You say it's over
But for me it had just begun

Tell me why we seem No More than strangers
Tell me why you feelin' never goes


Quel plaisir de se retrouver Seul, la nuit, parmi les livres. Elle parcourait les rayonnages, frôlant du bout des doigts les couvertures. Appréciant les différentes textures. La douceur du vélin, l'animalité du cuir, la simplicité du carton. Elle lisait les titres avec gourmandise. Savourant chaque mots. Les prononçant à voix basse pour essayer de percer leur secret. Extrapolant sur le plaisir qu'ils allaient lui procurer.
 
Le mélange d'odeur d'encaustique, de papier et de poussière l'apaisait. Temple ou tombeau selon la sensibilité de chacun, pour elle s'était un lieu de vie, emplie de rêves étranges et de savoirs ésotériques. Elle prit plusieurs recueils et se plongea dans sa lecture. Son corps n'était plus qu'une coquille vide posée dans un recoin de la bibliothèque. Elle ne voyait ni n'entendait plus rien. Elle était ailleurs, loin, si loin. Les mots l'avaient soustrait au monde des vivants.  

Une violente crampe d'estomac lui fit lâcher son livre. La faim la ramena aux contingences terrestres. Elle ne savait pas trop combien de temps elle était restée enfermé dans la bibliothèque ni depuis combien d'heures ou de jours elle avait épuisé ses réserves de nourritures. Elle remit en place les recueils achevés et rangea les autres dans son sac.

Le choc fut rude. Le Silence fit place au fracas. La solitude à la multitude. Le bourg de 3 milles habitants c'était métamorphosé en une ville nomade de 10 milles personnes.

Elle se jeta dans la foule comme on se jette à l'eau et se laissa emporter sans opposer de résistance. Dérivant à travers la ville, elle confia au destin le choix de sa destination. Elle stoppa son errance au pieds des murs du conservatoire. Derrière les hautes murailles de pierres, le bruit de la foire n'était plus qu'un bourdonnement lointain. Elle en apprécia le calme.

Ses doigts couraient le long des barreaux de la rampe d'escalier. Sa main tressautait comme elle l'avait fait enfant. De la même façon elle se glissa dans la cuisine par une petite porte à présent trop basse pour elle. Le vieux fourneau était éteint. Briqué jusqu'à la limite d'être poli, les plaques de cuivres qui fermaient son ventre, lui renvoyaient un reflet déformé. Elle sorti un plateau du vaisselier et s'occupa à le remplir de tout ce qu'elle trouvait d'appétissant. Prise d'un accès de boulimie Intense, elle abandonna vite son ridicule petit plateau pour se tourner vers un énorme panier aux capacités de remplissage qui lui faisait briller les yeux et couiner le ventre.

Elle s'adossa à un citronnier. Son panier gargantuesque à ses côtés, elle commença sa mission masticatoire. Les arbres embaumaient l'air de leur parfum. Elle se sentait bien. 10 m au dessus d'elle se trouvait les salles de répétition et elle entendait le son d'un violon languissant. Le ventre arrondi par l’excès de nourriture, elle s'allongea dans l'herbe, ferma les yeux, écoutant, respirant.  

Son environnement changea. Le crissement de l'herbe, une odeur. La sensation d'une présence lui fit ouvrir les yeux. Une épée. Pas n'importe quelle épée. Son épée. Elle reconnaissait la forme et les motifs du pommeau. Elle referma les yeux et patienta un instant avant de les rouvrir doucement. L'épée avait disparue.  

Il s'était allongé à ses cotés. Ce trouble. Si familier,si intense,si douloureux. Toute sa raison lui cria de fuir mais comment lutter alors qu'elle espérait cet instant depuis des mois. Leurs doigts se trouvèrent. Les flammes de la passion brûlèrent les affres de la raison. Cette dernière trouva refuge dans un coin de son esprit. Racornie. Condamnée au silence.
  
Leurs corps n'avaient rien oublié l'un de l'autre. Ils retrouvèrent leur univers mais rien de ce qui les éloignait n'avait changé. Croire le contraire serait illusion, et pourtant, elle se laissa bercer par ses paroles. Elle voulait tellement y croire. Un si joli songe.

   
Il l'avait prévenu qu'il devait partir quelques temps. Elle attendit. Un mois passa, puis deux puis l'évidence, puis la colère, puis la douleur, puis le vide. Elle avait toujours apprécié le silence. Elle n'aurait jamais cru que ce même silence la détruirait.  Elle savait que cette histoire était sans issue mais elle avait toujours pensé que son souvenir serait associé à leurs moments de plaisir et non pas à l'ignominie et à la trahison. Tout n'avait été que mensonge. Mots, gestes, amitié, sentiment. Mensonge. Ment. Songe. Son songe était un mensonge. Amer déception.  

Sa raison sortie de sa réserve, triomphante, impitoyable. Elle s'acharna sans répit. La raillant de sa crédulité, se gaussant de sa stupidité. « Il t'a fait croire qu'il te faisait l'amour alors qu'il ne faisait que te baiser.» Son indifférence pour elle devait pourtant être infinie pour qu'il agisse avec une telle insensibilité et cruauté à son égard. Comment avait elle pu ne se rendre compte de rien? Aveugle. Aveugle encore et toujours car encore maintenant elle espérait son retour. Elle aurait accepté n'importe quelle excuse, n'importe quel mensonge. Pitoyable. Stupide et pitoyable femelle.




Mardi 16 Juillet 2013 - 14:49:23
Chap 7 - Day To End

'cause I'm turning the desires Down
again rose the monstrous of hours in between
I Taint the thought
the Trauma Born inside
all the thoughts that you defined
tread the light again
take the Pain away
it feels as though time as tears
never seem to end.............


Elle reprit ses habitudes. Le temps avait endormi la douleur mais un voile de mélancolie restait accroché à ses pas.  Elle attendait. Elle ne faisait plus que cela. Chaque fois qu'elle repérait des traces de pas dans la neige, son cœur cognait plus fort dans sa poitrine. Une branche qui craque, un feu dans le lointain. L'espoir s'était transformé en déchirure perpétuelle. 

Un soir, elle aperçu une lueur au niveau de la grotte. Oubliant toute prudence, elle s'y précipita. Arrivé à proximité, elle aperçue plusieurs hommes. Cette fois encore son espoir fit son désespoir. Elle aurait pu faire demi tour. Elle aurait dû faire demi tour mais quelque chose en elle se réveilla. Tous ses sentiments de Rage et d'amour, qu'elle avait réussi à refouler depuis des mois, déferlèrent en elle et se cristallisèrent en une onde destructrice. Elle lança avec fureur son cheval à l'assaut de la colline. Arrivée au milieu des hommes, elle sauta à terre l'épée à la main. Elle frappa sans retenu,tranchant, éventrant, étripant. Avide de plaies béantes et de corps déchiquetés. 

Elle donna la mort comme elle avait fait l'amour, avec volupté et abandon. Amante funeste, elle vibrait de plaisir chaque fois que son épée pénétrait les chairs. Chaque goutte de sang sur ses lèvres était une caresse, chaque râle d'agonie, une jouissance. Elle buvait leur vie pour chasser sa douleur,cherchant dans leur sang le remède au Poison qui la crucifiait depuis des mois. Une seule chose comptait: faire mal comme elle avait mal.

Lorsque le dernier toucha terre, elle attendit. Scrutant son âme, sondant son cœur. Rien. Elle avait offert son bras à la mort, espérant qu'elle accepterait l'offrande et la délivrerait de sa souffrance mais cette catin s'était repue de sang et l'avait laissé à sa peine.

A bout de souffle, elle s'agenouilla dans la neige. Les mains à plat sur ses cuisses, elle tenta de rassembler ses esprits. Sa pensée la fuyait. Elle ne savait plus si le voile qui lui brouillait la vue était dû à son sang qui lui tambourinait les tempes ou au sang de ses victimes qui lui ruisselait sur le visage. Son cœur finit par se calmer. Elle se redressa et contempla son œuvre. Sur la neige, les traînées de sang dessinaient des arabesques barbares. Elles s'harmonisaient pour former d'étranges enluminures autour des corps inanimés. Sous l'éclat de la lune, le spectacle était terrible et envoûtant.

Elle sentie la nausée lui monter au bord des lèvres. La violence des spasmes lui firent remettre genou à terre. Elle vomie encore et encore. Lorsque la crise prie fin, elle se nettoya le visage avec une poignée de neige et se leva, épuisée. Elle pénétra dans la grotte, se saisie d'une branche enflammée et mis le feu à l'intérieur. Dernier acte de vengeance et premier de l'oubli.

De retour chez elle, elle anesthésia ses pensées à grand renfort de drogues et d'alcool. Elle savait l'inutilité de la chose. Un cataplasme psychique aussi délétère qu'éphémère mais ce soir, elle avait besoin d'arrêter le temps, d'oublier ne serait ce qu'une nuit. Au bout de quelques minutes, ils firent effet. Elle accueilli avec reconnaissance le bien être artificiel qu'ils lui procuraient. Elle se déshabilla et jeta ses vêtements souillés dans la cheminée puis, elle se dirigea vers la terrasse et fini son rituel de Purification en se plongeant dans les eaux chaudes de la source.

Elle se laissa couler tout au fond, laissant à la nature le soin de la laver. Les drogues,la chaleur et l'eau conjuguèrent leurs efforts pour dissoudre ce qui lui restait de lucidité. Sa perception se fragmenta. Lâcher prise. Savourer sa perdition. 

L'aube. De nouveau seule. Ni rancœur, ni regrets ne viennent entacher son âme. Il n'y a rien à dire, rien à faire. C'était juste la fin d'une histoire ordinaire.