Titre : Troops of Death/Thrash.
Le voilà enfin ce bouquin au sujet d'une des périodes les plus intéressantes de la musique metal de notre beau pays ! Et le moins qu'on puisse dire en tenant l'objet entre les mains, c'est que le travail possède un superbe rendu : 390 pages remplies jusqu'à la garde de textes, photos, témoignages, copies de flyers, tickets de concerts, pour la majorité originales et inédites évoquant avec précision, passion et parfois nostalgie les débuts et prémices de la scène extrême des 80's et du début des 90's. Il est indéniable que Sam Guillerand et Jérémie Grima les deux auteurs ont bien fait le boulot, et peuvent être fiers d'un livre quasi-exhaustif sur le sujet, ce qui n'est pas peu dire.
Après un éditorial qui annonce avec passion et dévouement la couleur, les interviews avec les principaux acteurs de la scène s'enchaînent, en commençant par les plus gros (Loudblast, Agressor, Nomed, Death Power, Mercyless, No Return, Supuration - seul Jean-Marc Tristani n'a pas participé à la confrèrie comme expliqué précisément dans le prologue de l'interview extraite des livrets des rééditions récentes des albums de Massacra). Les fans se délecteront ainsi d'anecdotes souvent savoureuses et détails "de la vraie vie" parfois lus sur des fanzines, ou appris par le bouche à oreille de cette époque, voire complètement inédits. Les anecdotes ou photos rappelleront ainsi à certains tel ou tel évènement et certains pourront dire le fameux "j'y étais à ça", ou "ça je le savais" au gré de la lecture de ces pages.
Plus méconnus, les interviews de groupes plus obscurs, et n'ayant souvent sorti qu'une paire de démos, mais bien connus des figures et fans locaux en fonction des régions, sont tout aussi intéressantes. Celles-ci font ressortir, au gré de questions posées étape par étape des sorties de chacun (à la manière de Snakepit Mag) toute la partie DIY omniprésente à cette époque, qui fera sourire / ébahir le lecteur en fonction de sa date de naissance, et de son vécu. Ainsi, nous avons pêle mêle des interviews de groupes comme Braindeath, Catacomb, Hoax ou Mestema qui enrichissent considérablement un bouquin poussant l'exhaustivité de cette scène jusqu'à ses limites. Plus, les interviews de journalistes d'alors (Guégano dont les passages concernant ses écrits chez Hard Force auraient mérité d'être plus creusés, Phil Pestilence), voire d'auteurs de fanzines (Ramadier et son franc-parler, Frank Arnaud,Thierry Guiard...) rappelleront de joyeux souvenirs à ceux qui ont connu l'avènement de la presse papier et les difficultés d'exposition de l'extrême à ces époques où tout était à construire. Finissons pour boucler la boucle, par les labels (historiques ou plus récents) tous encore marqués par cette période et fidèles au genre, qui apportent leur vision à ce livre (Shaxul, Jungle Hop...). Les rééditions de certaines démos oubliées prennent ainsi tout leur sens (Shud, les Tarnais de Terror Scum...) et nul doute que certaines rééditions à venir seront inspirées par ces lignes d'une richesse incomparable.
Alors, bien sûr, il eût été intéressant d'avoir aussi des ressentis de gens comme Christian Bivel ou d'autres distributeurs (les gérants des disquaires parisiens ou provinciaux, maintes fois évoqués dans le livre par les musiciens, centres de la vie musicale où nombre de fans se rencontraient, discutaient et liaient parfois dans ces lieux des amitiés encore vivantes de nos jours). Mais c'est vraiment pour chipoter, tant le travail fourni ici est considérable, et les tranches de vie foisonnantes empreintes ou non de nostalgie. Parmi les moments forts, citons l'interview de Ramadier, celle d'Alain Clément, mais chacun, chacune (Sybille de Witches et ses problèmes de line-up permanents, les plans labels galère, les différents fanzines et leur historique narrés par leurs auteurs) apporte sa pierre au vécu et celui qui souhaite investir une poignée d'euros ne le regrettera aucunement. Le prix de 5 Hard-Rock Magazine avec 3 pages maximum d'extrême dedans en somme. Ici, le thrasher ou le deathster aura des heures de lecture à venir. Avouons qu'il n'y a pas photo !
Source :
chronique
LeMoustre