(Non, je ne suis pas une groupie sans cervelle qui n'aime ce groupe que pour l'aura mystérieuse et suicidaire de feu Ian Curtis.)
"Control" est un biopic qui retrace le parcours de Ian Curtis au sein du groupe Joy
Division, des débuts de Ian au sein du groupe (alors nommé Warsaw), marquant ainsi le début réel du succès du quatuor, à sa mort (la veille du départ pour la grande tournée américaine), le 18 mai 1980. Ian avait alors 23 ans.
Ce biopic s'attache aussi et surtout à sa relation avec sa femme,
Deborah, mais aussi avec sa "maîtresse", Annik Honoré, une journaliste belge.
Ian était d'autant plus rongé par la culpabilité induite par sa relation extra-conjugale, que la gloire et les caprices grandissants des fans l'usaient sur tous les plans, en plus de son épilepsie que personne ne semblait vraiment vouloir admettre, au fond, misant tout sur Ian pour emmener le groupe aux sommets, et refusant sans doute d'accepter ses grandes limites, que de son côté il semblait ne pas réussir à
Imposer, craignant peut-être des réactions négatives de son entourage et un
Abandon de celui-ci.
Ce film ne nous apprend rien de nouveau, même si l'on découvre un Ian Curtis exaspérant, lâche certes, imparfait, au contraire de l'image idéalisée que la postérité a bien voulu façonner de lui. Si Ian Curtis était un être probablement très intelligent et cultivé, ça n'en fait pas pour autant un être intouchable, excusable et tout-puissant jusque dans ses défauts et le mal qu'il a pu infliger à autrui, et notamment à sa femme. Et puis quoi encore ? Cela rassure, en un sens : on voit enfin un être humain "normal" que l'on est en droit de critiquer, même s'il fut un "génie".
Le film bénéficie d'une excellente distribution. Tous les acteurs jouent avec une extrême justesse. Le groupe est incarné par quatre musiciens confirmés, dont Sam Riley, qui interprète Ian Curtis, et dont la ressemblance physique est plus que frappante. Notons aussi avec quelle précision hallucinante il a su reproduire les danses grand-guignolesques de l'original.
Au fil du film, le vrai-faux quatuor rejoue des extraits de chansons célèbres et bien sûr, "remasterisés" à merveille, si bien qu'on en voudrait beaucoup plus ("Insight", "Disorder", "Transmission", "She's lost control", "No love lost"...). L'effondrement pathologique de Ian sur "Dead Souls" est particulièrement bien pensé quand l'on connaît la musique et les paroles hantées de cette chanson...
Également, des extraits de textes de certaines chansons sont parfois récités par Sam Riley ("Heart And Soul", "Exercise One", "24 Hours"), suivant le contexte et la situation...
Le film est en noir et blanc et bénéficie d'une très belle photographie.
Par contre, c'est assez lent dans le rythme, donc adeptes du brut de décoffrage s'abstenir.
À noter que ce film est directement inspiré du livre "Touching From A Distance", livre écrit par
Deborah Curtis et publié en 1995, sur la vie de Ian Curtis.
Un film qui, s'il n'est pas extraordinaire, est très bien foutu et mérite d'avoir été récompensé.
Édit : le film est aussi pas mal déprimant.