SHADE EMPIRE
ZERO NEXUS (Album)
2008, Dynamic Arts Records




Matai : 14/20
Forts de leur talent en matière de compositions, nous ayant proposé un « Sinthetic » et un « Intoxicate O.S. » totalement déroutants, épiques et électroniques à la fois, proches du space opera et nous propulsant dans des confins encore peu explorés, Shade Empire remet le couvert en cette année 2008 avec un « Zero Nexus » sortant de l’ordinaire. Ainsi, on peut noter un changement de cap de la part des finlandais, puisque leur musique se veut tout autant black, peut-être moins axée électro mais plus indus. Car on aura bien évidemment notés cette prédominance des claviers sur les deux précédents opus, étouffant souvent les guitares et faisant ressortir un certain côté électro/rock.
Toutefois, « Zero Nexus » aborde d’autres propriétés que le groupe n’aura pas ou peu utilisées, tels que les changements de vocaux, qu’ils soient criés ou clairs, une agressivité palpable, et les changements d’ambiances au sein même des titres.

Le premier morceau « 9 in 1 » assez brutal et rentre dedans, nous prouve en partie ce changement d’orientation. Ce tranchant se veut présent autant dans le rythme que dans les guitares et les vocaux, paradé par des claviers discrets et un chant clair au refrain. Ce qui étonne forcément, c’est la mise en valeur des grattes, guitares et basse. Les accords et différentes lignes sont très bien audibles, d’autant plus que les riffs sont pour la plupart assez offensifs, des riffs black assez caractéristiques qu’on peinait à trouver avant, surtout dans « Sinthetic ».
On continue de la même manière avec « Adam & Eve », plus sombre et plus indus qu’électronique. Les claviers cette fois-ci sont au même niveau que le reste des instruments et le côté cosmique est d’autant plus mis en avant grâce à ce mélange subtil d’ambiances et d’agressivité. Le couplet, aux vocaux masculins (Adam), est plus incisif que le refrain, aux vocaux féminins (Eve), adouci par ce personnage mais aussi le piano.

« Flesh Relinquished » rappelle les origines électro du groupe par cette puissance des claviers indéniables et cette mise au second plan des guitares. Le dynamisme de ce titre ressemble étrangement à celui de « Sinthetic » si bien qu’il aurait bien pu se retrouver sur cet album-ci. Alors que « Havesters of Death » démarre sur les chapeaux de roues pour continuer et finir en trombe, sans répit, « Whiper from the Depths » est sans doute le titre le plus varié dans les ambiances et les rythmiques. L’intro dynamique et spatiale faisant légèrement penser à du Samael n’est qu’une sorte de prélude vu que la suite se veut plus posée et planante, alors que le chant black fonctionne un peu comme un murmure (« whisper ») soutenu par un chant clair. L’enrobage électronique est omniprésent, les claviers deviennent alors épiques, et les guitares, tranchantes à souhait. L’ensemble est assez lourd et compact, conçu pour nous emmener dans les profondeurs (« depths ») d’un monde presque oublié. Un morceau efficace et transportant.

La longueur du dernier morceau peut en impressionner plus d’un étant donné que ce n’est pas dans les habitudes de Shade Empire, la durée des pistes dépassant rarement les cinq minutes. Mais pourtant, « Victory » s’annonce comme un grand et monstrueux épilogue. En effet, l’intro mélancolique, calme et planante, où l’on entend que des chœurs masculins et une voix féminine pointer le bout de son nez n’est que l’arbre cachant la forêt vu que la suite est une réelle déflagration. Le mot « puissance » est celui qui me vient aussitôt à l’esprit pour qualifier les instruments et les vocaux. Pas de répit, pas un. Tout est bien dynamique et somptueux, et surtout poignant. Les riffs sont bien incisifs et nous mettent aussitôt en transe tandis que le chant ne peut que résonner en nous comme un cri plaintif jusqu’au break électronique et atmosphérique, dans une veine cosmique, guidée par une basse et une batterie au premier plan. Quand les guitares reviennent, comme lamentées, en osmose avec les claviers, c’est pour nous concocter une fin pour le moins inattendue car compacte et terriblement enivrante.

J’avais été grandement conquise par « Sinthetic » et son surplus d’électronique mais à la première écoute de ce « Zero Nexus » j’avais ressenti de la déception en me rendant compte que la musique n’était presque plus dans la même veine, que le groupe avait évolué en une sorte d’entité commerciale, cet album-ci étant, il faut le dire, plus accessible d’accès que ces frères. Toutefois, après avoir mieux appréhendé l’opus en question, j’ai mieux retrouvé les ambiances et les sonorités qu’on avait retrouvées par le passé, cette fois-ci mises aux premières loges par les guitares, et je le trouve même bon. Sauf qu’on ne retrouve pas sur « Zero Nexus » ces émotions, cette magie créative et ce don qu’a Shade Empire pour nous propulser loin, très loin, dans les méandres d’un univers sombre mais éclatant à la fois.

2010-08-15 00:00:00