CIRCUS MAXIMUS
THE 1ST CHAPTER (Album)
2005, Frontiers Records


1. Sin 05:53
2. Alive 05:38
3. Glory of the Empire 10:27
4. Biosfear 05:22
5. Silence from Angels Above 04:07
6. Why Am I Here 06:05
7. The Prophecy 06:44
8. The 1st Chapter 19:07

Bonustrack (European Release)
9. Haunted Dreams 07:13

Total playing time 1:20:36


BestJules69 : 17/20
«The 1st Chapter »…

Trois mots, insignifiants, mais qui mis bout à bout prennent tout leur sens. Certes, chacun interprétera ce titre différemment. Mais au-delà de cette pluralité, le titre pose une idée claire, précise et incontestable. Il fait la promesse d’une histoire. Il inscrit d’ores et déjà ce premier chapitre dans une quête dont les fins nous sont encore inconnues à ce stade de l’aventure. Et par-delà cette formule, lapidaire et puissante, qui dit si peu pour dire autant, se dessine un profil hors du commun : celui de Circus Maximus. Qui pouvait affirmer être capable de prédire, de sentir les choses ? Qui pouvait prétendre avoir le pouvoir de donner une suite à son histoire par la seule force de sa volonté? Certainement pas les jeunes musiciens encore inexpérimentés de Circus Maximus. A l’aube du troisième millénaire, le quintette prenait racine en Norvège. Puis, cinq longues années plus tard, le groupe accouchait de son premier album au titre si singulier. Sérieux ou ironie ? Arrogance ou audace ? Teintée de mystère, l’histoire pouvait alors commencer…

Qui a toujours aimé prendre des risques ? Pas grand monde, naturellement. C'est là le problème que rencontrent les groupes comme Circus Maximus qui officient depuis peu sur la scène professionnelle. Etant donné qu'ils n'ont aucune notoriété, on se plonge dans l'écoute avec une certaine appréhension, voire avec un apriori. En insérant le disque dans le lecteur, on prend le risque d'être déçu. Tout cela parait dérisoire mais joue un rôle non négligeable. La preuve n'est pas bien difficile à trouver. Il suffit d'allumer la radio et d'avoir assez de cran pour ne pas l'éteindre immédiatement lorsque les premiers méfaits se font entendre. Parmi tous ces titres commerciaux, on en sélectionne quelques-uns qu'on balance ensuite en boucle, et le tour est joué. Des millions d'audiences pour des millions d'endoctrinés, qui s'habituent à l'os rongé jusqu'à la moelle qu'on leur donne à manger quotidiennement, et qui ne sont donc plus surpris ni déçus par rien. Pour en revenir à nos moutons, le peu de crédit qu'on accorde aux groupes novices ne leur donnent aucun droit à l'erreur. Ils doivent immédiatement convaincre. Ce petit détail, Circus Maximus l'avait bien compris. Le début de l'album fait donc l'étalage du talent aussi bien technique que créatif des norvégiens. «Sin» nous fait rentrer dans le vif du sujet en posant d'emblée un riff accrocheur, lui-même relayé par une mélodie polyharmonique au caractère oriental. Les harmoniques d'abord tendues se radoucissent aux environs du premier refrain. Les qualités techniques du groupe s'expriment dans un solo de guitare très réussi. On retrouve aussi, sans surprise, des influences de Dream Theater, notamment dans le chant de Mickael, souvent dans le haut de la tessiture et légèrement poussé.

L'auditeur désormais réceptif à la musique, Circus Maximus développe les plans suivants tout en maintenant une constance de qualité dans la musique. Après un sympathique «Alive» arrive le premier titre phare de l'album. Long de plus de dix minutes, «Glory for the Empire» montre que la durée n'essouffle pas les norvégiens. Si sa structure reste relativement académique pour du progressif, le titre est efficace et il n'y a pas de temps mort. Le talent créatif du quintette est d'autant plus remarquable que l'album fait plus de 70 minutes. Les compositions sont variées et intéressantes, à l'exception peut-être de « Silence from Angel above ». Le morceau en soit n'est pas mauvais, mais son côté trop traditionnel et mollasson en fait le point faible de l'album, même s'il s'agit d'un titre que l'on pourrait qualifier de transition entre deux parties. L'album est par ailleurs très structuré, avec 2 parties équilibrées qui s'organisent autour d'un titre plus long, situé vers la fin, qui leur donne corps et personnalité.

Clairement, l'album n'est pas si facile d'accès qu'il le parait. Si certains titres ont un effet immédiat, d'autres demandent plusieurs écoutes pour être appréciés à leur juste valeur. On citera par exemple « Biosfear », le morceau le plus technique mais aussi le plus ambigu, qui peut sembler déroutant au premier abord. C'est une vraie démonstration de métal progressif doublé d'une dimension expérimentale que nous suggèrent les norvégiens. Ils juxtaposent ici des fragments mélodiques plus variés les uns que les autres. Très tendues à certains moments, les harmoniques sont plus ouvertes à d'autres. On note l'utilisation du marimba à l'unisson avec la guitare, qui donne ce côté léger et presque sympathique à la production, lequel est ensuite balayé par un riff ravageur qui vient tout déstabiliser. Difficile aussi de ne pas s'attarder sur le morceau éponyme qui vient clore l'album de manière magistrale. Du haut de ses 19 minutes, « The 1st Chapter » fait figure de colosse qui chamboule tout sur son passage. C'est une perle rare servie sur un plateau d'argent. Puissant et sombre par moments, brillant et épique à d'autres, le tout enrobé par une démonstration technique affolante, que dire de ce morceau si ce n'est qu'il s'agit là d'un chef d'œuvre en matière de progressif ? Seule la fin du titre reste énigmatique, et clôt l'album sur un fond d'air folklorique, sans doute une référence au monde du cirque que représente également la pochette de l'album.

Bien qu'elle soit passée relativement inaperçue aux yeux du grand public, c'est une performance remarquable qu'a réalisé Circus Maximus. Cela dit, les grands du genre ont bien vu qu'il s'agissait d'une œuvre majeure. Alors qu'au même moment les géants américains de Dream Theater sortaient le controversé « Octavarium », les norvégiens pondaient une œuvre majeure. Indéniablement, « The 1st Chapter » était au-dessus d' « Octavarium ». L'élève tendait à se hisser au niveau du maitre. Et le maitre, fatigué et en proie à un manque d'inspiration, finit par voir en l'élève un moyen de redorer son blason. Il est tout à fait normal que l'on puise ses influences dans la musique des autres. Autrement, il n'y aurait pas de genre musical à proprement parler ou alors il y aurait un million de styles différents. Mais avec le très moyen "A Dramatic Turn Of Events", qui s'est vendu par dizaines de milliers d'exemplaires, les américains s'appropriaient outrageusement la pochette de « The 1st Chapter », jusqu'à en imiter les plis du T-Shirt. Pendant que certains amassaient les lingots d'or, d'autres, meilleurs, mordaient la poussière et luttaient ardemment pour sortir « Nine », l'un des meilleurs albums de progressif de l'année 2012.

« Comment, vous n'en avez jamais entendu parler ? »

Triste constat, non ?

17/20

2013-07-25 13:25:29