eulmatt : 16/20 | Nouvel album des Polonais, Thelema 6 est passé par là, et c’est donc un nouveau statut que Behemoth doit défendre. Zos Kia Cultus se doit d’être l’album de la confirmation.
Première tendance nette : il ne faut pas compter sur une marche arrière stylistique. Une nouvelle fois, Behemoth ne fait pas dans la demi-mesure et semble décidé à confirmer que le black metal est bien de l’histoire ancienne. Les heureux possesseurs de Thelema 6 le savent déjà, mais à l’époque de la sortie de ce nouvel album, l’étiquette BM colle encore trop souvent aux basques des Polonais, à tort.
Bénéficiant d’un son plus dense, le death metal Behemothien ne semble pas avoir perdu de son mordant. Les riffs des deux gratteux ménagent toujours autant l’agressivité et le tranchant avec un lyrisme monumental inimitable. Derrière les fûts, Inferno assène les blasts métronomiques avec une concertante facilité. Quant à Iconoclast, son growl implacable semble désormais solidement en place pour déverser ses propos, oscillant entre blasphème et ésotérisme (la religion restant la thématique centrale).
L’ensemble garde donc une puissance de feu redoutable (comme avec le déflagrant Modern Iconoclasts), toutefois on sent que Behemoth a fourni un gros travail de composition sur cet album. S’écartant sciemment du côté direct et spontané de Thelema 6, le groupe semble vouloir laisser plus de place à de longues séquences plus lentes, où la lourdeur de l’atmosphère est privilégiée. Ce travail assumé sur les ambiances contribue à intensifier la teneur ésotérique de l’univers musical du groupe. Visiblement décidé à explorer la voie du mysticisme, Behemoth favorise le côté cérémonieux de sa musique par rapport à ses élans plus martiaux et plus crus. On en arrive ainsi à des morceaux lourds et intenses comme As Above so Below, ou des intermèdes type Hekau 718 qui contribuent à cette démarche. A noter que le même effort est fourni du côté de l’artwork et du livret, à l’esthétique sublime.
De la même façon, certains titres plus brutaux peinent à cacher leurs influences Morbid Angel (The Harlot Ov The Saints pour n’en citer qu’un), détail assez révélateur des ambitions du groupe et de ses nouveaux élans.
En cherchant à privilégier le ressenti, le fond de l’atmosphère, tout en travaillant largement ses compositions avec une certaine ambition, il est clair que Behemoth perd en impact pur et en fraîcheur ce qu’il gagne en puissance de fond et en monumentalité. On prendra en référence le superbe titre éponyme, hymne de noirceur cérémonieuse et incantatoire, écrasant de lourdeur et de solennité, sans devoir recourir à la vitesse et aux blasts. Ce Behemoth là impressionne, sûr de lui. Il ne se voit plus dans la mouvance d’un death black guerrier à la Krisiun. Il veut donc marcher sur les plates-bandes de Morbid Angel voire de Nile (avec le plutôt réussi Typhonian Soul Zodiack). Et le talent de Iconoclast est tel qu’il n’est pas loin d’atteindre son but. Même les sacro-saints hymnes de guerre, voués à la destruction massive des masses consentantes qui affluent aux nombreux concerts données par le groupe, sont de la partie. Et signe de l’inspiration du moment, ceux là mêmes transpirent de ces petites touches progressives et soignées, comme avec l’imparable Horns Ov Baphomet qui s’échine à montrer un visage plus versatile, sans perdre de sa force mystique.
Si je précise que Iconoclast atteint presque son but, c’est que le contexte de sortie de l’album n’est pas favorable aux Polonais. L’année 2002 s’avère un véritable millésime, notamment Outre-Atlantique, et face à l’excellence de la concurrence, Zos Kia Cultus, si il parvient brillamment à confirmer l’excellent Thelema 6 tout en affichant une volonté méritoire de faire évoluer son death metal, ne marque pas autant les esprits que deux ans auparavant, étant noyé dans une concurrence d’un niveau incroyable, qui repousse d’ailleurs bien souvent les limites de la brutalité. Dans le même temps, Iconoclast a joué la carte du ralentissement…
Mais peu importe. Behemoth a posé une nouvelle pierre de son mythe, pas la moins monumentale, son travail de fond continue à lui rAmener une masse de fans toujours plus nombreuse. Il ne faudra plus que le brio du Demigod à venir pour que le phénomène explose. 2009-09-07 00:00:00
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