Scorpions + Karelia (Zenith de Nantes)

le Vendredi 22 Octobre 2010, Zenith de Nantes



Scorpions

Le vent était relativement glacial en cette journée d’automne, vingt-deuxième jour d’un mois d’Octobre évoquant la dernière date française de la carrière des monstres sacrés de Scorpions. The last. Coup de rideau. The end. C’est la fin, la révérence, l’héritage est désormais porté sur la jeune génération, comme les Scorp’ le disent si bien (« The Best is Yet to Come »).
Alléchés à l’idée de vivre ce petit moment d’histoire, d’assister à cet ultime concert de la dernière tournée française des légendes allemandes en support de l’excellent « Sting in the Tail » (et tout le respect que déploie un groupe qui, après 19 albums, est capable d’enchainer les tueries), les 8 000 places du Zénith de Nantes fut assez vite remplis. Ayant vu ses portes ouvertes dès 18h, c’est devant un parterre complet que Karelia va débuter son show d’ouverture en tout point parfait de ce que l’on demande à un groupe de première partie.

Si les alsaciens ont bien évolué depuis leurs débuts, il n’en reste pas moins que Matt Kleiber est un super frontman et qu’il se sera démené pour faire bouger la fosse (les gradins étant relativement peu réceptifs au métal entre indus’ et heavy du combo). Pas statiques pour un sous, les musiciens ont parfaitement assurés et étaient heureux d’être là face à tant de monde. Matt dispose d’un organe vocal de plus en plus large, étalant tout son talent sur une introduction (spécialement composée pour le live) classique où il prit des airs de baryton, avant de voir débuter le riff écrasant et jouissif de « Restless », très indus et sombre, entre envolées lyriques sur le refrain et couplets beaucoup plus dark.
Le groupe jouera également quelques morceaux à l’allure plus gothique de « Raise » mais avec une réinterprétation très industrielle dans l’esprit, plus syncopée et lourde, peut-être même plus minimaliste. En hommage au regretté Steve Lee, Karelia aura eu la bonne idée de faire LA reprise qui tue en la présence de « The Show Must Go On » de qui-vous-savez. Le moment pour la foule de se réveiller un peu pour les (je pense nombreuses) personnes qui ne connaissaient pas les alsaciens. Un morceau repris par la foule mais avec une interprétation toute particulière, très froide musicalement (sans aspect péjoratif de ma part) et une nouvelle fois syncopé et lourde, à des années lumière de ce que Queen dégageait, peut-être pour ne pas se casser les dents, Karelia a tenté de livrer sa propre vision d’un hommage. Simplement admirable.

Restera également le délirant « My TV Sex », introduit après un solo de batterie de Nero (il fallait oser avant Scorpions, ils l’ont fait en jouant beaucoup avec le kick). Matt arrive sur scène, affublé de chaines bling bling typiquement rap, une veste ostentatoire de fausse fourrure et débute un slam rap sur quelques arpèges. Les cris d’indignations (volontaires) émanent du public à la plus grande joie du groupe provocateur qui déboulent la seconde suivante sur un riff énorme et un hurlement du guitariste Jack pour partir ensuite dans quelque chose de plus traditionnel, en revenant parfois au rap « pour montrer notre ouverture d’esprit ». Indice sur le prochain album déjà terminé ? Délire de la scène ? Impossible de savoir mais force est d’admettre que le talent de Matt au chant est multiple tant même son rap était réussi. Le groupe tira sa révérence avant les stars de la soirée…changement de backline…Scorpions est prêt à envahir le Zenith pour la dernière fois…rétrospective d’un clap de fin prenant la forme d’un hommage à la scène et d’une maitrise que seul les grands peuvent un jour atteindre.

Le noir envahit la salle. Les écrans géants s’allument sur des vidéos de la guerre tandis que retentit des déclamations en allemand. Des lights de toute beauté envahissent la scène, de part et d’autre de la scène, au fond mais aussi dessus, entourant la batterie de multiples écrans. Le riff de « Sting in the Tail » retentit et la salle devient tout d’un coup un immense brasier bruyant. Le son est énorme, incroyablement puissant, épais et clair, notamment celui de batterie, entre une caisse claire absolument parfaite, des coups de pédale parfaitement audibles et des toms à l’acoustique jouissifs. Les guitares de Matthias et Rudolf étaient aussi tranchantes que possible tandis que le chant de Klaus était idéalement placé pour être perceptible sans rien écraser au reste. Un mix de rêve en bref…pour un premier morceau immédiatement repris par la salle, assez impressionnant pour un morceau d’à peine 6 mois quand on a 40 ans de carrière…pourtant le refrain fait mouche, à l’instar des chœurs mécaniques assurés par Rudolf.



« Make It Real » suit et calme un peu le jeu avec son refrain très mélodique, impeccablement chanté par Klaus Meine. Autre sujet d’inquiétude immédiatement volatilisé après quelques secondes, la capacité de Klaus à courir partout, traverser la scène de long en large tout en chant sans fausses notes ses morceaux…simplement parfait tant le lutin germanique est parvenu à garder sa voix si personnelle à travers les âges (malgré une légère traversée du désert dans les années 90’). Puis le groupe va mettre la salle en transe dès l’évocation de son de chef d’œuvre ultime « Love at First Sting » en entament le riff cristallin et sublime de « Bad Boys Running Wild ». Le refrain est sur toutes les bouches, repris par 8 000 poumons, le groupe prend tellement de plaisir sur scène. Rudolf Schenker est une véritable pile électrique, sautant partout, courant de long en large, avec un immense sourire sur le visage et prenant de multiples poses, le rock n’ roll à l’état pur. Matthias Jabs détient quand à lui plus de flegme, un touché unique qui lui confère une énorme classe, moins rock mais plus classieuse, tandis que James Kottak est un véritable forcené sur sa batterie. Derrière son allure punk se cache un fou furieux martelant ses futs pendant presque deux heures avec une passion et une rage faisant plaisir à voir, un très gros frappeur. C’est d’ailleurs sur BBRW que sa plate forme mobile, perché à au moins 5/6 mètres de haut depuis le début du concert, redescend pour venir rejoindre le commun des mortels.

Changement complet de registre lorsque « The Zoo » retentit sur son riff minimaliste et clairement plus sec que la sophistication du morceau précédent. Klaus s’empare d’un petit tambourin à cymbales et monte sur les colonnes d’enceintes, le visage paré d’un sourire de gosse, visiblement heureux d’être sur scène, très loin de l’image de musicien blasé que l’on pourrait avoir de tels monstres ayant déjà tout vu, tout vécu et tout fait. Non, ils sont heureux d’être là et se donnent à 200% pour un public qui le lui rend très bien. « The Zoo » impressionnera notamment pour le défilement d’images en fond ainsi que pour son solo de près de trois minutes (rallongé encore pour l’occasion), joué intégralement à la talk box, ce petit tuyau que l’on branche sur le vibrato et déformant le son suivant l’inclinaison de la bouche de Matthias.


Autre vieillerie habituelle des concerts, l’instrumental « Coast to Coast » qui laisse Klaus Meine s’enticher d’une troisième guitare pour ce morceau des plus rock n’roll mais montant en puissance pour un final des plus puissants et écrasants (bordel mais ce son !!!). Les quatre musiciens (avec un Pawel Maciwoda beaucoup plus discret que les autres) prennent la pose et se mettent dans l’avance pour chauffer le public de la fosse qui n’en demandait pas tant pour hurler à plein poumon (dont votre aimable serviteur ici présent). « Loving You Sunday Morning » continu dans une veine beaucoup plus hard-rock avant que Klaus Meine ne fasse enfin une pause pour remercier Nantes, parler un petit peu de sa tournée française et remercier chaleureusement l’accueil qui fut fait à leur petit dernier. C’est d’ailleurs le symbolique « The Best is Yet to Come » qui va suivre pour l’un des moments les plus beaux du concert. L’émotion se dégageant du morceau étant déjà énorme sur disque, elle se voit décuplée lors de cet ultime concert, Klaus faisant répéter les « hohohoho » du refrain des dizaines et des dizaines de fois à capella, le ‘sieur gardant une aura lorsque la musique se tut, magistrale et magique, à pleurer. La tension est palpable, l’impression de vivre un moment clairement unique…
Pendant que Klaus continu de faire chanter la foule, Rudlof et Matthias reviennent avec de magnifiques guitares acoustiques (une Fling V acoustique…) pour entamer une trilogie angélique sous le signe de la beauté et de l’émotion. En effet, « Send Me an Angel », « Holidays » et la sublime « Wind of Change » suivent les unes après les autres tandis que l’on se dit que le moment est véritablement béni par les dieux, loin de tout, loin du monde, loin de nos vies. Scorpions nous emmène très haut avec lui, notamment sur un magique "Holidays", minimaliste et sensible, étalant tout le talent de Klaus, avant l’explosion électrique écrasante laissant éclater une fosse de fans aux anges. Et que dire de « Wind of Change » ? Culte à mourir, l’une des plus belles chansons du groupe allemand aura été l’un des sommets d’une soirée en tout points parfaite.



Après ces moments d’émotions, Scorpions revient au groove rock avec un nouvel extrait de « Sting in the Tail » en la présence d’un « Raised on Rock » taillé pour le live, très groovy et entrainante, et évoquant les vertes années du groupe, « Virgin Killer » en tête. « Tease Me Please Me » est lancé sur la même voie et se trouvera même transfigurer par la puissance du live, l’un des titres ayant le plus tout déchiré du concert, obligeant même les gradins à enfin daigné se levé pour bouger un peu que simplement applaudir et chanter comme des enfants dociles (l’écart de générations entre les publics probablement…).

Les lumières s’éteignent…les musiciens remercient le public…(« Merci Nantes…merci pour tout, vous êtes le meilleur public de la tournée française et de très loin » - propos confirmé par Karelia au merchandising) et quittant la scène. Une poursuite s’allume…puis une deuxième sur James Kottack. S’ensuivra un défilement de vidéos retraçant un récapitulatif de la carrière du combo, vidéos ayant comme acteur principal l’acteur le batteur vivant les pochettes des albums (pochette toutes plus ou moins cocasses quand on les regarde bien), et entrecoupés de plans de batterie réglés à la seconde près. Travail d’orfèvre dans lequel il nous montrera toute l’étendue de son talent autant de musicien que de showman, le gus s’amusant à faire chanter et chauffant la salle à lui seul (il est également, au passage, le seul à chanter sur tous les morceaux les backing vocaux de Klaus). Découpant la salle en trois parties, il fera hurler les 8 000 spectateurs à tour de rôle avant une ultime vidéo introduisant le riff principal, simple comme le monde, de deux notes mais tellement culte de… « Blackout ». Les quatre ‘zicos surgissent d’un passage s’ouvrant sous la batterie et entame l’un de ses hymnes les plus fédérateurs et directs, repris une nouvelle fois par une fosse en délire (ce refrain…). Et lorsque Matthias entame un solo dans l’avancée pour étaler son savoir faire soliste, c’est avec une impressionnante humilité et un sens de la répartie menant à l’archi culte « Big City Nights » encore une fois connu de tous (avec ses vidéos de gratte-ciels en toile de fond).




Le groupe quitte alors la scène…remercie Nantes une nouvelle fois…malgré le fait que l’on sache tous très bien que ce n’est pas fini. Où est « Still Loving You » ?
Elle arrive justement…lorsque Klaus revient sur scène, seul, et l’annonce comme le messie. L’ovation est incroyable dès le premier arpège et devient encore plus gorgé d’émotion lorsqu’il murmure « Time…It Needs Time… ». Chaque mots est sur toutes les lèvres, jusqu’à l’envolé finale, puis le solo, joué par Rudolf, plutôt avare de solo (il est bien plus reconnu pour son travail rythmique dans Scorpions), entre celui-ci et celui de Blackout, joué sur un magnifique Flying V doré. Des confettis commencent à voler quand retentit alors le riff de « Rock You Like a Hurricane », accompagné de son solo d’entrée reconnaissable entre mille (et ce Kottak qui défonce ses toms basses avec une agressivité folle). Le délire est toujours présent alors que musiciens se lâchent pour de bons, se déchainant (bordel qui les traitaient de papys ?) pour un de ses plus grands hymnes hard rock.

Clap de fin. Multiples clap clap dans la foule…multiples hurlements dans la fosse…multiples remerciements sur scène…multiples images dans la tête. Scorpions est venu, a vu et a vécu…Scorpions est grand, immense…ce soir, nous étions face à des dieux du Hard. Et pour ceux qui ne les avaient jamais vu et qui probablement ne les verront plus jamais, il y aura un avant et un après…

The Best is Yet to Come…I know…You know…





 
[Je tiens à remercier Julien, Nono, Susu et Angie qui ont fait de cette soirée exceptionnelle un moment encore plus mémorable...ainsi que pris ces quelques photos.]


10 Commentaires

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MadSissi - 01 Novembre 2010: j'y étais aussi !
Cristelle_Moret_Rabet - 01 Novembre 2010: excellent live-report tu as exactement transcris toutes les émotions et sensations que l'on a pu ressentir ce soir du 22/10/10 au Zenith de NANTES ...super concert SCORPIONS FOR EVER
pique - 07 Novembre 2010: Superbe live report qui est très très fidèle au concert. Et moi aussi j'y était , j'ai vu , j'ai vécu et je m'en souviendrait un bon moment encore!
goddess.of.thunder - 04 Août 2011: J'y étais, et je n'oublierai jamais. C'était pas mon premier du groupe, ni mon dernier... (4 fois en tout, dont 3 sur cette tournée !)

Mais wow. Triste de les laisser partir maintenant.
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