ANTHRAX
STATE OF EUPHORIA (Album)
1988, Megaforce Records / Island Records




eulmatt : 13/20
Selon un vieil adage sportif, le plus dur n'est pas d'arriver au sommet, mais plutôt d'y rester. Et voilà qu'un an après l'excellent Among the Living, tandis que les autres monstres du thrash ont tous sorti un album référence en cette année 88, Anthrax rate le tournant, même si le disque eut un succès certain aux USA à l'époque de sa sortie.

Les premières notes de Be All, End All, mélodie basique mais entraînante et rythme soutenu, font oublier la mauvaise impression laissée par une pochette pas très encourageante. Oui mais voilà, on enchaîne avec un nouveau titre au riff minimaliste, Out of Sight, Out Of Mind. Bien sûr, les quelques mosh parts reboostent de temps à autre, un break qui sonne le déjà vu rompt la monotonie, mal épaulé par le solo de Dan Spitz (qui n'a jamais été très inspiré à ce niveau). Et on repart pour un tour. Bien, et la suite ? Une intro plutôt prometteuse, et on repart à grands coups de double pédale, et de rythmique très hardcore, avant que Joey Belladonna vienne nous sortir un refrain franchement hors de propos. La chanson a beau s'appeler Make Me Laugh, on commence à rire jaune. La puissance et l'énergie des New-Yorkais fait illusion, mais est gâchée par ces compos mal ficelées et ce chant qui devient horripilant au fil des minutes, malgré des paroles (comme toujours) jamais dénuées d'intérêt. Il faut donc s'en remettre à l'excellente reprise d'Antisocial pour retrouver un sérieux et une rigueur plus en rapport avec ce que l'on attend d'un disque de métal. Pour le coup, la version de nos métalleux français prend un sacré coup de vieux...la puissance et le son d'Anthrax boostent ce titre mythique, pour en faire une reprise d'anthologie. Seul le chant...je ne vais pas en rajouter.

L'enchaînement sur l'intro plutôt sombre et pêchue de Who Cares Wins laisse espérer le meilleur. Accélération, temporisation, le riff redevient banal, Belladonna intervient, il commence sérieusement à m'agacer. La rythmique fait ce qu'elle peut, mais le jeu du batteur Charlie Benante tourne aussi en boucle, le tout est prévisible, malgré une évidente bonne volonté et une débauche d'énergie irréprochable. Now It's Dark est carrément massacré par des vocaux hors de propos, alors que la composition n'est pas désagréable et les riffs bien foutus. Schism tourne carrément à la kermesse hardcore, Misery Loves Company surnage un poil, 13 ne sert à rien. Et puis il y a Finale, ses guitares aiguisées, sa batterie nerveuse, qui entre deux refrains lamentables, réussissent à nous faire headbanguer pour de bon. Parce qu'Anthrax reste quand même une sacrée référence quand il s'agit d'accélérer brutalement, et de lancer des invitations au pogo.

C'est tout le paradoxe de ce groupe. State of Euphoria est bien le frère d'Among the Living, les deux albums se ressemblent franchement, mais quand l'un était inventif, soigné, jouissif, l'autre est plus fade, répétitif, un poil lassant. Les New-Yorkais jouent la même musique, mais l'inspiration n'est plus la même, les riffs plus quelconques, les titres plus longs et plus monotones. Mais ce qui a consommé le divorce avec Anthrax, en ce qui me concerne, c'est le chant de Belladonna, bien moins discret que sur les albums précédents et franchement plus irritant. De quoi en tout cas faire perdre une bonne partie de la crédibilité d'Anthrax aux yeux de la scène du métal extrême - sans préjuger du noyau dur de fans -, les shorts à fleurs n'ayant rien arrangé.

Pour synthétiser de manière plus nuancée State of Euphoria, j'ai envie de le présenter comme un clone d'Among the Living, les morceaux cultes en moins (Caught In A Mosh, I Am the Law, Indians), et la bonne reprise d'Antisocial en plus. De là à en faire un indispensable...à chacun de voir.


2007-09-04 00:00:00