FUNEREAL PRESENCE
THE ARCHER TAKES AIM (Album)
2014, Sepulchral Voice Records / Ajna Offensive


1. The Towers Fall 12:29
2. The Archer Takes Aim 12:47
3. Dämmerlicht 06:38
4. Gestalt des Endes 16:19

Total playing time 48:23


Icare : 15/20
Funereal Presence est un one man band américain formé en 2003 et totalement inconnu du grand public puisqu’il ne sort avec ce The Archer Takes Aim que son premier full length après un premier EP passé quasiment inaperçu en 2011.
Premier album en 7 ans d’existence, donc, voilà qui a priori laisse largement le temps de peaufiner un art musical riche et soigné et de retranscrire au mieux les visions morbides de l’âme solitaire qu’est Bestial Devotion.



L’artiste nous offre un black dissonant et sombre avec une influence assez forte de Darkthrone qui s’incarne surtout dans la noirceur primitive et incantatoire des riffs et les blasts moribonds qui roulent sans discontinuer dans un ciel chargé de lourds nuages sombres. Les guitares alternent entre passages entraînants très typés black n’ roll et riffs maladifs et sifflants qui se dissolvent sur la rythmique hypnotique. La basse se fait entêtante sur certains passages, rappelant Nehemah (le passage dès 2,37 minutes de The Tower Falls, Dämmerlicht), et le tout est indéniablement marqué au fer rouge par le sceau indélébile et maudit du true black traditionnel. Les passages les plus glaciaux, lents et dissonants peuvent quant à eux faire penser à des groupes comme Tenebrae In Perpetuum (l’intro du premier titre) ou The Arrival of Satan.


Quoi qu’il en soit, Funereal Presence ne se contente pas d’épouser complaisamment le minimalisme inhérent habituellement au style et de sonner comme un ersatz sans âme de Darkthrone comme il en pullule des dizaines : on sent que l’artiste met un point d’honneur à proposer une musique riche en offrant de nombreux changements de rythmes et d’ambiances pour affiner son art noir – bon, ça reste du true black, tout est relatif, hein… - et le premier titre, du haut de ses 12,29 minutes, propose un bon condensé de la vision musicale de l’Américain.
The Tower Falls est un titre dynamique et accrocheur qui sonne très norvégien, avec ce petit côté black n’ roll crasseux et blasphématoire, mais qui n’hésite pas à varier le propos, alternant arpèges décharnés aux relents d’ambiant maladif, furie blasphématrice, et envolées dans les confins d’une spiritualité noire et démoniaque (avec ces petits sons de cloche qui viennent conférer une touche mystique presque sacrée). Une autre particularité du groupe, ce sont ces chœurs clairs, lointains et évanescents, comme émanant d'un autre temps, presque baroques et assez inhabituels dans le style, qui ajoutent une aura de désespoir et de résignation supplémentaire à la musique s’il en était encore besoin.


S’ensuit The Archer Takes Aim, qui suit la même logique que le premier titre, tout aussi long, mais en plus répétitif et moins accrocheur, le riffing étant moins prenant, manquant de variations et de passages forts - malgré cet orgue funèbre qui ouvre le titre sur fond de guitares charbonneuses - et qui constituera le point faible de l’album, même s’il reste tout à fait correct.
Dämmerlicht commence alors sur quelques notes de guitare dissonantes aux mélodies inquiétantes avant de se poursuivre sur un riff basique et headbangant terriblement efficace, renforcé par les secousses telluriques de la basse et le roulement inlassable de la double. Le riff, répétitif et entêtant, se répercute sans fin, tandis que des stridences aiguës viennent se dissoudre dans ce magma en fusion pour conférer un côté ésotérique au tout. Ce morceau purement instrumental fera office d’introduction sombre et rythmée pour la pièce maîtresse de l’album, Gestalt des Endes, qui, du haut de ses 16,19 minutes, clôt magistralement l’album : tout y est, riffs primaires et headbangants, trémolos bien noirs et gorgés de feeling, chant arraché appuyé par des choeurs fantomatiques, arpèges désolés alternant avec rythmiques dévastatrices..., ou comment finir l'album en beauté.



Voilà qu’en 4 titres pour 48 minutes, Funereal Presence a brillamment fait le tour de la question, déversant à la face du monde bien-pensant un true black bien noir et habité ne manquant ni de relief ni de subtilités musicales. Au rayon des reproches, on pourra déplorer un son un peu trop lisse et étouffé, qui certes sied bien au style, mais empêche une immersion plus totale dans l’univers claustrophobe du combo. De même, les parties de batterie sont souvent un peu simplistes, et ces échos sourds à la résonance synthétique sont assez irritants et donnent parfois l’impression que le musicien s’acharne sur un kit en carton. Mais honnêtement, on a vu largement pire dans le style, et si l’on accepte de passer outre un son tout de même largement passable, nul doute que The Archer Takes Aim saura séduire tous les amateurs de true black envoûtant, original et travaillé.
Une très bonne première réalisation, et une excellente surprise !

2014-03-16 16:57:05