WITCHTRAP (COL)
VENGEANCE IS MY NAME (Album)
2012, Hell's Headbangers Records / Dirty Sound Records




LeMoustre
Les pochettes avec des dinosaures ou des représentations "Néanderthalesques" comme ici font sans manquer leur petit effet chez votre serviteur. Immanquablement cela procure un certain charme désuet à l'oeuvre qui se cache derrière. Ici, sous l'appellation "Dynamic Power Black Metal" (on reviendra sur cette dénomination quelque peu sujette à erreur) mentionnée sur la pochette intérieure figurent cinq musiciens. On est en 2012 en Colombie. A Medellin plus précisément, ville plus célèbre pour ses négoces illicites que pour la recherche paléontologique.

Actif depuis 1997, Witchtrap a vu sortir son troisième album chez Hellsheadbangers en 2012, comme 6 ans avant et son prédécesseur, No Anesthesia. Sur ce disque, les Colombiens font parler la poudre dans une veine speed/thrash de tradition, avec quelques injections que ne renierait pas un Midnight en forme. Le chant, éraillé comme un Miland Petrozza encore boutonneux, se superpose à un riffing speed/thrash vif, presque rock parfois, tout en conservant une ligne directrice cohérente, héritée de la première moitié des eighties. Devant le renouveau récent de ce genre, porté par les Hellripper, Sacrifizer, Deceiver et autres Hexecutor, nul doute que cet album de Witchtrap saura convaincre les adeptes des groupes précités, tant les morceaux sont efficaces ("Vengeance Is My Name", "Winds of War"). Ainsi, et c'est ce qui fait sa force, chaque titre, du rapide "Put to Death" qui sent bon le (très) jeune Metallica au plus ambiancé "The Queen of Hell", c'est la fête au jambon : tout est bon là dedans.

S'inspirant de la période pré-1986 (les 2 premiers Exciter, Show no Mercy, Endless Pain, Sentence of Death), le speed/thrash un brin maléfique de Witchtrap ne sacrifie pas cette orientation aux refrains, riffs entraînants et arrangements naturels. Tout sonne comme de vrais morceaux pensés et rodés, avec une personnalité certes connue, mais bien ancrée. Sans aucun artifice, les Colombiens pondent des hymnes comme on en faisait déjà plus à cette période (2012), comme une aube au genre (le heavy brontosaure de "The Queen of Hell", au final bien plus fin qu'il n'y paraît). En ce sens, pour revenir sur la pochette, l'affichage n'est pas entièrement mensonger, le retour vers le passé est acté, comme si Witchtrap défrichait un style encore vierge. Mais bien sûr nulle trace de "Power Black Metal" ici. Mais du bon vieux heavy/speed/thrash des origines à mi chemin entre école allemande (on pense fortement au Destruction de 1983-85 sur "Venomous Breath" par exemple) et américaine, avant que les albums majeurs de 1986 viennent tout balayer, par un professionnalisme naissant et des productions plus musclées.

Adeptes de régression temporelle autant que musicale, ce disque de Witchtrap est pour vous. Balayant le spectre des débuts des années 80 avec talent au gré de morceaux qui défilent à vitesse grand V, ce Vengeance Is My Name au parfum délicieusement vétuste est un disque qui ne peut déplaire sur le fond aux inconditionnels du speed/thrash rétro. Une Madeleine de Proust pour les enfants de cette époque, en somme (le final "I'll Take Your Head" ne trompe guère) qui assurera un bon moment à ses acquéreurs, avec un goût de reviens-y délectable, farci de petits trésors (le solo de "Damned to the Core" par exemple), et sans temps mort. Vraiment sympa, dans le genre.

2020-08-31 16:04:04