VENGEANCE (NL)
CRYSTAL EYE (Album)
2012, Steamhammer




AlonewithL : 11/20
Le groupe néerlandais de heavy metal puis de hard rock « Vengeance » a passé le cap des trente années d’existence. Une longévité ternie par une absence, celle du guitariste Jan Somers, décédé des suites d’une crise cardiaque en 2011. Pourtant le groupe formé par Leon Goewie serait décidé à poursuivre sa trajectoire, presque comme si rien ne s’était passé entre temps. C’est ainsi qu’un nouvel album voit le jour peu de temps après ce tragique événement, sous le label Steamhammer Records. Show must go on, devrait-on résumer pareille situation. Pourtant le groupe n’oubliera pas son ex-guitariste, incluant son dernier solo enregistré et quelques parties guitare de son fils Timo Somers (« Delain »), invité pour l’occasion. Les sourires sont crispés, l’heure n’est pas à la fête. Ça irait jusqu’à affecter la musique de « Vengeance », qui au lieu de rendre un vibrant hommage, réalise un album tout juste potable. Là haut, un œil de cristal se met à pleurer.

« Me And You » voudrait nous ôter toute peine. On remarque bien que le titre a le rythme au corps. Le batteur Chris Slade n’y va en tout cas pas par quatre chemins. C’est fort, direct. La guitare de Keri Kelli n’a pas grand mal non plus à délivrer tout son peps. Mais voila, il y a un acteur qui aurait plus de mal que les autres, et pas des moindres. Leon Goewie nous offre un chant déchiré, pas des plus agréables à l’écoute. Il aurait fâcheuse tendance à pousser exagérément sa voix, à la rendre complètement folle. Cela peut être tout à fait volontaire, mais ne reprendrait pas la même tonalité que celle de la musique. Même sur l’insolent « Shock Me Now », il ne suit pas du tout la mesure, quite aussi à en faire des tonnes. On aurait cru qu’il se retiendrait de toute surenchère sur « Bar to the Bone » et sa rythmique groove. Au premier abord il se montre assez entreprenant. Puis Leon s’énerve pour un rien. Il faut dire aussi que musicalement ça tourne en rond, du moins ça ne partage pas du tout le même état d’esprit que notre chanteur.

Mais « Vengeance » aura sa Vengeance. La formation devra néanmoins attendre jusqu’à « Desperate Woman » pour l’obtenir. Comme tout bon voyage, une hôtesse vient vous accueillir chaleureusement. Ensuite, il n’y a plus qu’à attendre venir le lourd, un riffing heavy metal en amorce de dynamite. Ce qu’il y a surtout de détonnant sur ce titre, c’est sans nulle doute le refrain, simple, mais incisif et diablement efficace. Hormis, ce morceau en béton armé, « Vengeance » c’est aujourd’hui et tout au plus un groupe de hard rock. De ceux, nombreux, qui s’inspirent avant tout du son en provenance de la lointaine Amérique. On pourra à loisir vérifier cette idée à l’écoute de « Five Knuckle Shuffle », reprenant quelque peu le style d’un d‘un certain « Aerosmith ». Le morceau comprend même quelques chœurs pour adoucir une ambiance surchauffée. Cette chaleur américaine perdurera sur le mouvementé « Whole Lotta Metal ». Un titre énergique dans le pur esprit rock n’ roll. Mais il sera étonnant de remarquer Leon prendre des airs de Biff Byford dans son chant, jusqu‘à suivre certaines de ses intonations. En plus de ce passage tout le long du golfe du Mexique, « Vengeance » nous emmènera dans une autre région où le soleil brille, en Californie avec le morceau « Barbeque ». Il n’y a pas à s’y tromper, c’est du pur « Guns n’ Roses », avec des chœurs en refrain pour soutenir un chant principal à la parade. Débordant de vitalité, mais relativement peu inspiré.

Pour l’instant, rien ne laisserait paraître qu’il y a eu mort d’homme au sein de la formation. On chercherait insidieusement et artificiellement à maintenir la bonne humeur. Il faudra attendre les quatre derniers titres pour être rappelé à la réalité, et se rendre compte que la formation n’a pas oublier le mot « tristesse ». Celle-ci transparait d’ailleurs de l’éponyme « Crystal Eye ». Avec ce titre, on change littéralement de dimension. Alternant entre passages forts et calmes. L’atmosphère est à la fois lourde et agitée, assez déboussolante. Leon Boewie ne se montrera pas plus performant que sur les autres titres. Il serait décidément à la peine, mais en comparaison des chœurs, celui-ci ne sera pas à considérer comme le plus désordonné. Les ballades seront pour lui l’occasion de rattraper ses défaillances. « Promise Me » joue sur le respect mutuel entre chant et instruments. Une ballade sensuelle, mais redondante et sans la moindre originalité. On accorderait plus d’attention à l’émotion sensible de « Missing ». Leon Goewie nous paraît vraiment touché et pris de douleur. Il n’aurait sans doute pas fallu que ça traîne plus de 5 longues minutes. L’auditeur finira lassé de ses pleurs. Le titre final sera laissé au défunt Jan Somers et à sa guitare sur « Jans End Piece ». Un long soli de plus d’une minute adressé à la foule lors d’un concert. Dernier enregistrement connu du guitariste, qui aura été semble t-il à l’origine de l’artwork de ce dernier album de « Vengeance ».

Cette couverture serait malheureusement la meilleure chose à retenir de l’opus. L’œuvre produite par Michael Voss n’est pas l’hommage tant attendu à Jan Somers. Scindé en deux parties bien distinctes, l’album interroge. « Vengeance » a-t-il seulement un avenir après pareille offrande? Son leader n’aura pas brillé, ça c’est certain. Les autres n’auront pas su se montrer plus convaincants. C’est tout juste s’ils ont souhaité faire un album à minima, sans se douter qu’après le décès d’un de leurs compères, cette formation néerlandaise en plein déclin serait placée sous le feu des projecteurs. À croire que « Vengeance » restera à jamais connu seulement comme ayant été l’ancien groupe d’Arjen Lucassen …… et de Jan Somers.

11/20

2012-02-17 13:40:48