PAYSAGE D'HIVER
WINTERKäLTE (Demo)
2001, Kunsthall




Nattskog
« Winterkaelte »… le temps froid de l’hiver. Effectivement, cette démo de près de quatre vingt dix minutes nous offre un aperçu glaçant de ce que peut être cette saison que l’on s’aperçoit peu connaître finalement, nous autres pauvres citadins.
Heureusement, « Winterkaelte » est là pour mettre les points sur les i. Ce long exposé d’une heure et demie sur les temps et les saisons se présente comme une sorte de ballade cauchemardesque dans les montagne de l’Helvétie dont est originaire Wintherr, pays relativement peu épargné par le froid, et dont les glaciers le rappellent tous les jours. Alors je serais tenté de dire que l’hiver n’est une saison réjouissante pour personne normalement constitué, parce qu’il fait froid, que les gens râlent tout le temps (en été aussi remarquez…), qu’ils toussent, reniflent, vous filent leurs maladies etc. Mais avec Paysage d’Hiver, cette saison prend une autre dimension : ici, point de gens, point de maladies, fi des préoccupations mondaines et de toute forme de vie…

…La ballade commence par les sons d’une marche dans la neige au milieu d’une tempête, dans une sensation d’isolement assez étouffante. Jusque là, rien d’extraordinaire pour une introduction… mais ce qui est étonnant, c’est que ce thème revient assez régulièrement, entre chaque morceau pour être précis, nous rappeler ce qu’on fait là. Ce qui me permet de signaler en passant que même avec un lecteur de cassettes sophistiqué, on ne peut pas aller d’un passage black à un autre facilement : il n’y a pas de blancs.
Puis arrivent les guitares, le chant et la batterie… comme à son habitude, Wintherr ne nous honore pas d’une production extraordinaire, mais soyons francs, une production de qualité ne conviendrait pas à l’ambiance recherchée. Nous y reviendrons.
Les morceaux alternent entre violence et calme, avec des passages atmosphériques à rendre dément le plus solides amateurs de musique sombre… Ces claviers ambiant, seul Paysage d’Hiver en a la recette. Ils ajoutent au mépris déjà immense qui s’échappe de la musique une sorte de chape nocturne indéfinissable qu’on ne capte que lors d’une écoute attentive, cette enveloppe qui est la marque de fabrique « Wintherr » et qui rend accro la plupart des mortels ayant accès à ses Œuvres.

Objectivement, à part les thèmes musicaux très différents de ceux présents sur l’album éponyme (et la plupart de ses autres bienfaisances - lol), déjà chroniqué ici, la base est la même : guitares très fortes, bien mises en avant, chant hyper saturé en retrait pour que ce soit encore plus incompréhensible, et des nappes de claviers ambiant qui viennent par moment donner une dimension extraordinairement glaciale à une mixture déjà proche du zéro absolu.
Les coupures "tempête de neige" permettent de marquer la progression des titres dans le temps et dans le cycle que veut nous faire visiter Wintherr. Parfois agrémentés d’instruments plus "traditionnels", on pourra y entendre de la guitare sèche, de la flûte traversière (même dans les morceaux en eux-même) ou des claviers éthérés, et de temps à autre des paroles presque chuchotées.

Je le dis une fois pour toutes, pour aimer Paysage d’Hiver, il ne faut pas faire la fine bouche sur le son un peu… rêche. Il faut voir – ou plutôt écouter l’ensemble de la musique (si si c’en est !), toutes les harmonies dépressives, cet univers de nuit et de glace qui ne s’aborde qu’en étant en parfaite symbiose avec cette acception du metal en tant que musique extrême tant dans les buts que dans les moyens utilisés pour y parvenir. Pour faire donner pleinement ce dénuement ultime, cet isolement que l’on ressent à l’écoute de tout album de Paysage d’Hiver, la sonorité ne peut pas être meilleure, au risque de gâcher le rendu final.
Et c’est sans doute à cause de cette solitude face à ce talent quasi mystique que pas mal de personnes (en fait, pas tant que ça… les probabilités d’entendre un morceau de ce groupe sans vraiment le vouloir sont relativement faibles rassurez vous) se réfugient derrière une façade moqueuse en prétextant un son de merde ou des compositions répétitives.
Mais si je dis que ce groupe est le seul à me transcender de la sorte, c’est bien qu’il y a quelque chose. Et ce quelque chose, les rares élus auxquels j’ai fait écouter l’ont ressenti (vade retro, sceptiques !)
Donc je recommande « Winterkaelte » à toutes celles et ceux qui n’ont pas peur d’être incompris, et qui n’ont pas peur de faire un petit voyage dans les alpages en plein hiver.

Mieux qu’une salle climatisée en pleine canicule… je vous laisse je dois aller chercher du gibier pour mon dîner.

2005-02-14 00:00:00