Ebrithil : 18/20 | Les Discrets .. ? Qu'est-ce donc que ceci ?
Assurément, voilà un groupe de la scène rock française (au sens large du terme) qui porte bien son nom. Pourtant, après lecture d'une chronique élogieuse dans un magazine, le nom m'était resté en tête.
Toutefois c'est l'artwork, plus que cette chronique, qui m'a poussé à jeter une oreille sur ce Septembre et Ses Dernières Pensées.
Un artwork qui, l'air de rien, en dit long sur le contenu de l'album ... mystérieux, sombre, gris, l'air d'un monotone soir d'hiver... mais avec un côté à la fois malsain et enfantin, comme si l'enfance n'avait été qu'un rêve et que le réveil en était la fin ... voilà tout ce que cette simple pochette me dit, et au sortir de cet album, toutes ces impressions se bousculent en moi, mélangées, mêlées à bien d'autres difficiles à décrire.
Une chose est certaine : je viens d'effectuer un voyage musical qui, si il n'est pas dépaysant au sens propre du terme, reste spécial. Par ce mois de mai automnal, quelle ne fut pas ma surprise d'écouter une musique collant si bien à la morosité ambiante, cela soit dit sans aucune connotation péjorative.
Car Les Discrets ne nous enfoncent pas dans cette morosité, ils nous la montrent, la font ressentir via une musique désabusée, et qui réussit l'exploit d'être à la fois sombre et ... lumineuse. A l'image de cette Echappée d'ouverture, à l'ambiance mélancolique et aux arpèges transpercés d'une mélodie magnifique, qui accompagnent le chant tout en finesse (bien que parfois trop nonchalant, ce qui empêche de saisir les subtilités des paroles...). Le message que j'ai reçu m'a semblé le suivant : oui, les choses vont mal, oui, il fait noir dehors, mais ça ira mieux. La lumière s'allumera, et si elle ne s'allume pas, sors à l'aveuglette !
Mais Les Discrets savent l'être moins, comme le prouvent les riffs et les ambiances faisant penser à Primordial présents sur Les Feuilles de l'Olivier, hommage métaphorique à la beauté qui s'en va... et qui revient, comme tout au long de l'album qui ne se laisse jamais aller à ses élans metal et revient vite sur le droit chemin de la mélodie. A de rares moments, cela peut paraitre hésitant (L'Effet de Nuit), mais quasi-toujours, la maîtrise est parfaite.
La métaphore, Les Discrets la maîtrisent, et le montrent sur Song for Moutains, qui, bien plus qu'une ode à la beauté des chaînes montagneuses, est une réflexion sur l'Homme et la faculté qu'il a de détruire les choses pour les remplacer par d'autres, moins belles et tellement moins agréables... Le tout dans un accompagnement électro-acoustique de toute beauté.
Lorsqu'enfin, à la voix masculine se joint un chant féminin éthéré et mystérieux, le résultat donne un morceau en apparence plus léger mais au final plus oppressant qu'autre chose, car laissant une impression d'inachevé (Les Quais) ... et pourtant, cet inachevé n'est pas dérangeant, car la musique nous emmène tellement loin que l'on pourrait presque en imaginer la fin.
Et comment ne pas parler de cette adaptation du célébrissime poème de Verlaine, Chanson d'Automne, qui semble ici avoir été écrit pour le groupe tant il colle à l'ambiance... automnale qui se dégage du disque. Enrobée d'une musique sublime et crépusculaire, la poésie de Verlaine renaît par Les Discrets et la voix de Fursy Teyssier, chanteur à fleur de peau.
Quant au diptyque final, il nous envoûte une dernière fois, avant de nous réveiller par des paroles répondant au titre éponyme de l'album ("Nous avons donc fait ce voyage, un après-midi d'automne ...") ... une fin toute en douceur et en luminosité, pour un album qui, si il ne touchera pas forcément tout un chacun, est une véritable perle de sensibilité.
Les Discrets signent donc là leur premier véritable album, et il est possible qu'ils ne sortent pas immédiatement de leur relatif anonymat avec celui-ci.
Et pourtant, rares sont les artistes à nous offrir de tels moments de magie, loin de toute virtuosité technique, loin même d'un éventuel chef-d'oeuvre intemporel.
Juste un peu de magie... et parfois, cela suffit. 2010-05-14 00:00:00
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