DEMONICA
DEMONSTROUS (Album)
2010, Massacre Records


1. Demon Class 04:01
2. Ghost Hunt 06:05
3. My Tongue 03:49
4. Luscious Damned 05:01
5. Below Zero 04:51
6. Alien Six 03:26
7. Palace of Glass 04:37
8. Fast and Furious 03:36
9. Summoned 04:49
10. Astronomica 08:22

Total playing time 48:37


da_sway : 13/20
Comme nous le disait régulièrement un certain animateur français très controversé: méfiez-vous des contrefaçons! Car en effet, derrière cette peau neuve au logo ultra-moderne, l'équipe de Demonica est en fait composé presque de vieux briscards. En réalité, la conception même de la création du groupe semble être une affaire de casting. Effectivement, s'apercevoir que la paire de guitaristes n'est autre que la doublette Craig Locicero de Forbidden et Hank Shermann de Mercyful Fate ainsi que derrière les fûts siège un routard du thrash en la personne de Mark Hernandez, ça attire l'œil, n'est-ce pas? Nul doute que les nostalgiques de titres comme "Curse of the Pharaohs" de l'excellentissime "Melissa" ou encore du magique "Through Eyes Of Glass" de l'album "Forbidden Evil" y trouveront un intérêt certain.

L'affiche est explosive et l'ambition affichée est à la hauteur. Ils se targuent d'allier la classe européenne au son estampillé Bay Area, faisaint côtoyer leurs diverses origines à la fois californienne, des Rocheuses ainsi que du port danois des commerçants (Copenhague). Des propos à prendre comme une promesse qu'il va leur falloir tenir face à notre attention aiguisée, et donc sévère.

La première impression ne peut être hélas que contrastée: le son est très puissant et moderne, mais à un tel point que tout paraît surfait et paradoxalement un peu léger. Cette intransigeance surdimensionnée qu'on peut retrouver dans chaque morceaux prend parfois le pas sur le travail de fond. Voilà en quoi réside la principale faiblesse de ce "Demonica" et, en influençant la toile de fond sur laquelle se basent les dix titres, elle est de taille!

Pourtant, à en écouter plus attentivement, on remarque avec un certain contraste qu'un fin mélange se maintient en équilibre entre un thrash plutôt authentique composé de riffs classiques de souche et un déchaînement étouffant couplé à une atmosphère lourde assez typique du genre en ce nouveau millénaire. "My Tongue" prouve bien cette alternance entre ces plans complémentaires.

Second fait marquant, le chant du dénommé Klaus "Hyr" Hansen sûrement un peu retouché en studio au point qu'on croirait entendre Tom Araya période moderne chanter à travers un ordinateur. D'ailleurs, l'ombre slayerienne ne plane jamais très loin... écoutez donc ce titre phare "Demon Class" et prouvez-en moi le contraire! Pour en revenir à la prestation vocale, elle se présente donc de manière plutôt spéciale mais grâce à des refrains entêtants comme ceux de "Alien Six" ou "Ghost Hunt", on se prend vite dans ce jeu sonore qui finit par pénétrer l'inconscient auditif.

Tout s'enchaîne dans une linéarité sécurisante et au final, les grandes étapes stratégiques de la construction de ces quasi 50 minutes de prestation musicale ne sont pas légions. On notera tout de même les transitions rythmiques intéressantes dans "Luscious Damned", les tonalités presque électroniques qui habillent le morceau "Palace Of Class", les chuchotements angoissants dans l'ambiance mélodique et pourtant froide du bien nommé "Below Zero" ainsi que les multiples solis d'une précision chirurgicale.

Finalement, il vous attendre le tryptique final pour qu'un intérêt vraiment spécifique se précise et même qu'une certaine magie s'opère. Pourtant, "Fast And Furious" laissait présager le pire dans une sorte de déchaînement d'intense difforme... mais quelle surprise d'entendre ce progressisme où s'entremêlent torrent mélodique et gestion intelligente du contre-temps entre guitare et batterie! La quasi-marche militaire que représente "Summoned" en est la continuité parfaite tout autant qu'elle en est le contrepied plus mid-tempo. D'ailleurs, il est plutôt ironique de reconnaître des consonances de la voix d'Hetfield période Reload / St Anger dans ce titre.

On finit par contre en apothéose avec une merveille instrumentale au nom d'"Astronomica". Comme le ciel étoilé qui n'est jamais deux nuits de suite identique, on passe par une multitude d'émotions complexes. Entre une mélodie mélancolique sous fond de mélange de sons indus et tribales, une torture psychédélique et dépressive, un thrash devenu soudainement éminemment technique grâce notamment à un énorme effort d'Hernandez à la batterie et même un léger soupçon de rythmique rock'n'roll, on assiste à un éclectisme dans tous ses états! Un finish mémorable pour clore les débats.

Au final, "Demonstrous" est un album plus que correct, plutôt fidèle à la parole donnée, sans pour autant laisser exploser un enthousiasme débordant. Les anciens se mettent au goût du jour, empruntant ce son moderne si prisé de nos jours, apportant son lot d'avantages et de défauts. Le caractère et une certaine profondeur ténébreuse sont indéniables mais cette constance à se laisser à de l'agressivité outrancière, comme pour cacher quelques lacunes d'originalité fort regrettable, en fait un opus un peu trop facile d'accès pour marquer durablement les esprits. Voilà pourquoi oserais-je remettre en question la pérennité de ce travail dans la mémoire collective ainsi que sa candidature hypothétique au titre de classique.

2010-03-17 00:00:00